André FRÉNAUD

André FRÉNAUD



André Frénaud, né en 1907, à Montceau-les-Mines, est mort en 1993, à Paris, où il vécut une grande partie de sa vie, avant de rejoindre la Bourgogne, partageant son temps entre la capitale et son village de l'Auxois où il repose. Il étudia la philosophie et le droit, participa parmi beaucoup d'engagements, à la Résistance. Poète d'une envergure rare, il ne s'exprima que peu en prose. Sans complaisance envers les modes, sans narcissisme, comme le rappelle l'argument du colloque qui lui fut consacré à Cerisy-La-Salle, en 2000, sous la direction de Marie-Claire Bancquart, André Frénaud s’attache fortement à la présence charnelle du monde pour dire un exil fondamental. Il poursuit une quête ontologique à travers les lieux, sa Bourgogne natale, comme les villes de sa vie et de ses voyages, Paris, Rome, Prague... Il se parcourt lui-même entre détresse et espoir, dans un va-et-vient qui se voudrait unificateur. La quête de la totalité est certes décevante. Frénaud éprouve le sentiment d’une fêlure: “Je me suis inacceptable”. Il refuse violemment son christianisme d’enfance, qui lui fournit de constantes références biaisées. Pénétré par le sentiment d’une absence absurde, il se dirige, dans et par l’immanence, vers un horizon mystique du Néant. Nulle concession: de là ses difficultés avec les politiques, dont il a toujours rejeté les dieux, comme avec la femme et son “malamour”. Cependant, le poème, lui, justifie l’obstination dans la recherche : permettant la “transformation de la détresse en non espoir assumé”, il offre la possibilité d’une “condensation-illimitation soudaine”. Sarcasmes, agressivité, gravité, chaleur, l’écriture de Frénaud, abrupte et somptueuse, est elle-même un va-et-vient, comme ses poèmes tantôt très amples, tantôt d’une brièveté qui tend au minimal. Il y a beaucoup à dire sur cette œuvre singulière, l’une des plus importantes de la poésie contemporaine. Au petit cimetière de Bussy-le-Grand où repose André Frénaud, une pierre porte ces mots : Où est mon pays ? C'est dans le poème. Il n'est pas d'autre lieu où je veux reposer. À lire : Les Rois mages (Seghers, 1943), Poèmes de Brandebourg (NRF, 1947), Poèmes de dessous le plancher (Gallimard, 1949), Il n'y a pas de paradis (Gallimard, 1962), L'Étape dans la clairière (Gallimard, 1966), Les Rois mages (Seghers, 1966), La Sainte Face (Gallimard, 1968), Depuis toujours déjà (Gallimard, 1970), Notre inhabileté fatale (1972), La Sorcière de Rome (Gallimard, 1973), Haeres (Gallimard, 1982), Nul ne s'égare (Gallimard, 1986), Glose à la sorcière (Gallimard, 1995).

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : DIVERS ÉTATS DU LOINTAIN n° 34