Fabrice PASCAUD

Fabrice PASCAUD



Tarologue, astrologue et écrivain, Fabrice Pascaud est né en 1960 à Poitiers. Étude de psychologie et de philosophie. Découvre le surréalisme vers l’âge de 17 ans ainsi que l’ésotérisme. La lecture de l’œuvre d’André Breton sera déterminante, tout comme celle du parapsychologue Raymond Réant, en 1980, avec lequel il pratique des états modifiés de conscience (appelé « transe hypnotique », l’EMC, tout à fait naturel, correspond à une modification de l’état de conscience ordinaire (notre fonctionnement quotidien et rationnel), un ralentissement de nos ondes cérébrales en comparaison de celles de l’état d’éveil, celui de notre fonctionnement quotidien et rationnel. Il peut survenir lorsque nous rêvons ou pratiquons une activité artistique ou être provoqué en méditation ou grâce à des méthodes spécifiques utilisées dans le cadre d’une hypnothérapie. Il apparaît comme étant un état intermédiaire entre la veille et le sommeil).

Passage dans le milieu artistique : société Pathé cinéma et le théâtre dans la compagnie Renaud-Barrault. Membre du groupe surréaliste de Paris dans les années 1990 ; Fabrice Pascaud a été membre du comité de lecture de la revue « L’astrologue », créée par André Barbault, de 2000 jusqu’à 2010, collaborateur de l'INRESS (Institut de Recherche sur les Expériences Extraordinaires, né du constat suivant : il est possible de s’intéresser à ces expériences que nous n’arrivons pas à expliquer et que nous qualifions d’extraordinaires, voir de « surnaturelles », tout en conservant les deux pieds sur terre) et de la revue surréaliste "Supérieur Inconnu" (trois séries, 30 numéros, 1995-2011, dont le dernier a été conçu et édité par Les Hommes sans Épaules), fondée et dirigée par Sarane Alexandrian. Il est notamment l’auteur de livres et de nombreux articles sur l’art, le tarot, l’astrologie, le surréalisme, de la monographie de la peintre Myriam Bat Yosef et du livret (88 pages) accompagnant, dans un coffret, le DVD du film de Fabrice Maze « Victor Brauner, le grand illuminateur totémique » (Collection Phases, Seven Doc, 2014).

Fabrice Pascaud a exercé le métier de journaliste durant vingt-cinq ans (en tant que rédacteur de sujets concernant l’ésotérisme et la parapsychologie), conjointement à son activité d’astrologue (« l’astrologie est le langage des astres qui épouse la musique intérieure de l’homme ») et de tarologue : « Le tarot de Marseille, est un livre initiatique, un cheminement spirituel. C’est un livre de connaissance de soi, mais auquel il manque la reliure. De fait, pour chacun, les vingt-deux lames majeures à notre naissance sont dans le désordre et il nous revient la tâche de remettre de l’ordre dans notre monde intérieur. Pour cela, le tarot de Marseille est un guide remarquable. Donc, contrairement aux oracles, le tarot de Marseille offre d’infinies approches. »

Mais, l’astrologie et le tarot ne sont pas les seules passions de Fabrice Pascaud, qui écrit : « La vie réserve toujours sa part d’imprévu - ce qui se dérobe sans cesse au jeu clair-obscur du regard – et ce même si parfois le contenu de celle-ci résonne en soi intensément. » Et bien des domaines de vie, d’art, de pensée, de création, résonnent fortement en lui,  dont la Connaissance est empirique, ne serait-ce que la musique, la poésie (il est un fou de Rimbaud, notamment, et lui-même auteur de poèmes, qu’il n’a pas ou peu publiés), le cinéma, le surréalisme (essentiel dans sa vie et son parcours) et toujours l’amour, dont ce très fin lecteur de l’œuvre d’André Breton (il est l’auteur d’articles et d’études aussi sensibles qu’intelligents sur « le grand indésirable »), nous dit : « L’amour se cultive comme une fleur fragile qu’il faut entretenir sans en abimer les pétales. Malcolm de Chazal poète mauricien disait : « Pour qui n’a pas compris la fleur, ne peut aimer la femme ». Plus qu’un apprentissage qui m’évoquerait le mental, l’amour est une forme d’initiation liée au ressenti, à l’intuition. On s’enfante à travers l’amour comme une énergie qui se renouvelle sans cesse, mais nécessite une extrême prudence et une grande attention. »

Les derniers mots poignants de sa mère, Lydia, voyante médium, disparue en 1995, furent du même ordre : « L’occultisme, c’est la science des énergies et l’énergie la plus forte et la plus belle est l’amour. Quand tu as réussi à établir cette note vibratoire entre une autre personne et toi, vous vous trouvez dès cet instant en union astrale car vous avez ainsi constitué un double éthérique que jamais rien ici-bas ne pourra détruire. »

Et n'oublions surtout pas le rêve, dont Fabrice Pascaud, écrit, à partir de l’expérience d’André Breton : « Breton a tenté de chercher le point où les deux mondes, le réel et le rêve, peuvent se rejoindre. Le texte du poète « Les vases communicants », de par son titre même pense que ces deux mondes communiquent en fait. Le monde du rêve a toujours fasciné ceux qui ont tenté de s’approfondir dans son exploration. Il s’agit toujours de rechercher cette jonction avec le monde réel afin de délimiter avec précision où finit le réel et où le monde onirique prend naissance. Comme beaucoup d’autres, étant donné que tout est vécu par l’homme, que ce soit sa vie réelle concernant sa présence physique et ses gestes quotidiens des plus futiles aux plus importants quand cela se trouve, les rêves aussi, ceux qui surviennent pendant le sommeil et ceux vécus en étant éveillé, ont une place tout aussi importante pour la personne. D’ailleurs, Breton va jusqu’à regretter que les scientifiques ne se soient pas penchés davantage sur cette notion du rêve et irait jusqu’à reprocher, en quelque sorte, à Freud de nier l’existence du “rêve prophétique” en soi. “Les vases communicants” sont donc un essai dans lequel, à travers une étude précise et en citant des exemples précis, Breton tente de montrer que le rêve est une nécessité naturelle à laquelle nous devons donner la dimension à laquelle il a droit.

En fait, ce que Breton cherche à mettre en valeur, ce n’est pas l’apologie du rêve en soi, mais plutôt la destination de l’homme dans sa totalité. Pour cela, étant donné que le rêve fait bel et bien partie de la vie de l’homme, Breton pense qu’il est ne serait pas normal de soustraire cette partie de la vie, aussi immatérielle, soit-elle, surtout dans la mesure où dans certains cas, elle peut avoir une influence directe sur la personne. Il est possible de citer entre autres certains rêves prémonitoires de l’auteur lui-même qui se sont matérialisés de manière effective dans sa vie réelle et dans ses écrits.

La communication entre le monde réel et le monde du rêve a préoccupé Breton à tel point qu’il lui a consacré un essai entier afin d’exposer sa manière de considérer les deux mondes et leur lieu de jonction. Il y voit en quelque sorte que la vie quotidienne de chacun, si celui-ci prenait le temps de “saisir” ses rêves et leur donner la valeur qu’elles méritent dans le déroulement de sa vie quotidienne, il pourrait alors mener cette vie différemment et peut-être obtenir des satisfactions qu’il n’aurait pas connues autrement. Cette manière d’entrevoir les choses pourrait se tenir davantage dans les écrits que dans la vie réelle pure et simple dans laquelle le rêve demeure avant tout une suite d’images qui s’évaporent au moment matérialisé. »

Christophe DAUPHIN

(Revue Les Hommes sans Epaules)

 

A lire : Le Tarot, Divination et symbolisme (éditions Bussière, 2020), Le Tarot de l’art d’aimer (éditions Bussière, 2019), Victor Brauner, le grand illuminateur totémique (Collection Phases, Seven Doc, 2014), Myriam Bat-Yosef, monographie accompagnée d’un DVD (Somogy, 2005), Lydia Pascaud, confession d’une voyante (éd. Clair de terre, 2001).

Site : www.fabrice-pascaud.fr

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L’ANTRE-CIEL-ETHER

 

La poésie est née (cette façon faussement historique du parler, simple métaphore) par le fait non d’hommes qui se proposaient d’être poète, mais d’êtres qui atteignirent la poésie en visant l’existence, envahis par un flux et qui faisaient voir et toucher aux autres ce qu’ils voyaient, touchaient eux-mêmes. Ce flux de l’agir n’est-il pas à la source de tout jaillissement susceptible d’exposer l’être intérieur à son propre feu ? Ce faire ne saurait vivre en l’absence de l’autre dont la présence préside à toute manifestation et confère tout son sens au voir. « Donner à voir », à « toucher » s’impose dès lors que se profile l’éclipse du face-à-face qui se joue des incidences du jour par jeux de clair-obscur.

Ces « êtres qui atteignirent la poésie en visant l’existence » ne sont-ils pas frères de ceux qui contemplèrent le ciel pour en comprendre le langage, en écouter la musique et en interpréter les messages ? Ces hommes « encielisés » scrutant la course des nuages et interprétant le vol des oiseaux pour entrer en vibration poétique avec l’univers. Ces hommes pour qui le Verbe des astres se fit révélation parce qu’ils entendirent en eux un murmure secret auquel ils se devaient de répondre. Et ces hommes devinrent le théâtre d’un ciel de chair et de sang avec par ordre d’apparition : Le Soleil gouverneur de la vitalité, du cœur et de l’œil droit ; la Lune : de l’enfance, de l’imaginaire et de l’œil gauche ; Mercure : de l’adolescence, de la mobilité et de l’intellect ; Vénus : de la beauté, de l’amour et des arts ; Mars : des élans, de l’énergie et de la force ; Jupiter : de l’orgueil, de la noblesse et de la générosité ; Saturne : du squelette, de la sagesse et du temps ; Uranus : des découvertes, de la révolte et de l’indépendance ; Neptune : des rêves, de l’idéalisme et de l’utopie. Pluton : de la métamorphose, des épreuves et de la mort. Le ciel composa/conjugua l’Homme lequel (re)devint l’antre-ciel-Ether. Uranie enfanta l’astrologie et poètes et astrologues ne formèrent plus qu’un. Et si le poète doit se faire voyant, selon l’injonction de Rimbaud, l’astrologue, de son côté, se doit d’être poète et de garder à hauteur d’envol la musicalité des sphères.

Mais le psychologisme de l’astrologie contemporaine dédaigne la puissance évocatrice et créatrice de l’analogie poétique et allonge la psyché sur le divan des mille et un brouillards. L’identification du complexe simplifie l’interprétation, et le chiffrage des planètes fait grimper la rationalité sur l’échelle des statistiques. Le feu prométhéen se réduit à la flambée du dollar, et l’ascétisme saturnien au krach boursier. Le symbole et le mythe sont misérablement ramenés au sol avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre. Signe ascendant, où te caches-tu ? Tristesse d’Uranie qui devrait en appeler à une occultation nette et profonde de son savoir.

Qui n’a pas épousé les courbes de sa Vénus intérieure ne peut appréhender l’Aphrodite de ses rêves. Par ce jeu de correspondances, l’être vit son incarnation sans prendre possession de lui-même. Car se posséder, quel sens cela a-t-il ? C’est dans une dépossession permanente que l’énergie créatrice s’engendre et peut, de ce « lâcher-prise », transformer le monde. Participer à l’effort d’ascension vers notre harmonie céleste intime c’est rétablir de façon consciente notre lien avec le cosmos. Ce n’est pas le Saturne d’en haut qui alourdit notre marche, mais notre Saturne intérieur qui plombe nos semelles ! L’inversion de sens aurait son mot à dire car elle ouvrirait l’esprit sur une pensée sans cesse en renaissance. Rétorquerait-on : « À chacun son temps » qu’il en serait fini de cette époque car, en fait, la question ne relèverait plus de la circonstance, ni du milieu mais de plans psychiques parallèles. Cette dynamique nous permettrait de dépasser le seuil de nos élans interrompus parce que le temps consacré serait ainsi aboli.

« La lampe dans l’horloge » ce titre d’André Breton, indépendamment de son texte, est à lui seul évocateur. Cette association de la lampe et de l’horloge m’a toujours fait songer par analogie à l’arcane VIIII du Tarot : L’Hermite (en correspondance avec Saturne). La quête incessante, la nécessité impérieuse du dévoilement et son rapport au temps en tant que composé d’énergie et de tension (dans le sens de tendre vers…). Cette cape marine dont est vêtu l’Hermite nous renvoie à notre propre nuit mentale. Un pan d’étoffe s’écarte — ouverture vers l’or — et nous rappelle que le Grand Œuvre, donnant naissance à l’Adepte, repose sur la précision du geste et de l’orientation. Cette lampe, à hauteur d’yeux, donne à voir ce que la vue ordinaire interdit. Mais elle semble reposer comme dans un équilibre suspendu, la courbure de la main formant l’arche du départ. Cet équilibre suspendu invite au dépassement, mais à la mesure du chemin parcouru. Chaque étape implique impérativement un niveau d’intégration, de conscience en l’absence desquels toute avancée serait pure illusion. Ce cheminement sous cape impose à l’esprit une mobilité inverse à sa volonté initiale, et l’entraîne à devoir se redéfinir sans cesse. De cette « rotation mentale », la notion de l’acquis deviendrait obsolète car, grâce à cette impulsion de dégagement, s’ouvrirait la brèche par laquelle s’infiltrerait ce que nous sommes en devenir (Ce que l’on dit de mon « je suis » éclaterait sur le vif car l’immédiateté de mon échappée mentale laisserait sur place une enveloppe charnelle qui ne serait plus mienne). Sous cette cape marine s’écoule le rouge qui se nourrit du feu. Moralement où le feu n’est plus, rien n’est plus (et l’on ne saurait confondre avec le feu les braises défaillantes avec lesquelles certains se chauffent). Ce feu qui tient le rôle de purificateur, d’éveilleur ranime la flamme de la soudaineté par laquelle se manifeste le flux de l’intuition, étincelle aurifère dans la nuit de l’esprit. Mais, là aussi, prudence sur le jeu du feu car la règle à suivre n’a pas de sentier(s) défini(s) par avance puisqu’il(s) se déroule(nt) à mesure que la foulée de l’esprit naît à elle-même dans l’immédiateté de l’instant. Discernement. Vigilance…

L’astrologue a pour mission de rétablir les connexions endormies au cœur de l’être. Il est le vent révélateur qui ventile le ciel-esprit. Saturne mal intégré, en désaccord avec la mesure des sphères, entraîne une chute mélodique et un attiédissement du feu intérieur. D’où la cacophonie galopante et assourdissante qui handicape toute création soi-disant inspirée. L’intelligence prend naissance quand l’esprit, le cœur et le corps sont en harmonie réelle. « Quelle évidence ! » dira-t-on. Alors, je demande qu’on me démontre sur-le-champ cette évidence. Je ne vous vois plus, je ne vous entends plus, où êtes-vous ?

Mais est-ce à dire que l’astrologue échappe aux corridors de son endormissement ? À la disharmonie de sa partition céleste ? Certes non. Lui comme tout autre — et peut-être plus que tout autre — se doit de ne jamais considérer sa connaissance comme un absolu de vérité, comme un acquis indiscutable. Car songe-t-il un seul instant que le message des astres ne lui appartient pas, pour qu’aussitôt ses assises se mettent à chanceler. Pour qu’aussitôt il se raccroche à la bonne charpente matérialiste et se fasse fort de mettre Uranus à ras de terre de crainte qu’il lui brûlât la cervelle. Trop de fausses paix proclamées sous couvert de Jupiter. Trop de conformismes sclérosants répandus sous le sceau de Saturne. Trop de poudre de perlimpinpin pour nous faire prendre la poudre d’escampette ! Avec cette pensée abjecte de « Qui veut la paix prépare la guerre » ou « La fin justifie les moyens » l’homme ne participe-t-il pas à la « dégénérescence » des valeurs originelles de Jupiter ? Ramenant Zeus à la formation en rangs bien serrés et au pas cadencé, les idées les plus aberrantes ont donc toute liberté d’action. Et quand bien même selon l’adage « Jupiter rend fous ceux qu’il veut perdre » ceux-ci ne seraient jamais assez perdus. Régler le symbole sur la fréquence humaine parasite le champ de la perception et laisse toute liberté d’emprises aux manipulations mentales. Ainsi bien des prévisions malheureuses parce que l’astrologue « modern style » a abandonné son rôle de fils du feu — dans l’acception prométhéenne — au profit du mirador phénoménal qui balise sa promenade existentielle.

Le renversement de signe ne doit-il pas être pris en considération sur la matière même de l’astrologie ? Car de ce renversement de signe à la révision déchirante découlant de la mutation des psychismes dont parlait Carlo Suarès, il n’y a que la transition pour l’humanité de l’ère des Poissons à l’ère du Verseau, soit le déplacement du point Gamma. Cette mutation aurait pour conséquence l’anéantissement de tous les symboles provoquant ainsi l’irruption d’une nouvelle énergie psychique. Ce parallèle entre l’entrée dans l’ère du Verseau et la révolution des consciences ramènerait l’homme non à son état primordial mais à son essence subtile à partir de laquelle se dresserait un monde nouveau parce que débarrassé de toutes les scories mentales.

Cette hypothèse (nous n’y sommes pas encore, et pas prêts d’y être mais l’anticipation est permise…  ne peut laisser indifférent l’astrologue que je suis et qui exerce son art à la lumière des symboles et des mythes. Cette ère nouvelle se placera sous le règne d’Uranus gouverneur du signe du Verseau. Uranus — Ouranos chez les grecs — est une énergie d’arrachement, d’émancipation, de libération de tous liens qui rattachent à la matière, handicapent l’élancement de l’être, alors que l’ère des Poissons — émotionnelle et affective — dans laquelle nous sommes marque les utopies, les grands courants collectifs, humanitaires, qu’ils soient d’ordre politique tel le Marxisme, utopique comme Charles Fourrier et son phalanstère jusqu’à l’inconscient collectif de C.G. Jung, et sans oublier le mouvement spiritualiste new age auquel se rattache — dans ses fondements— l’astrologie humaniste de Dane Rudhyar. L’homme se cherche intérieurement mais par projection vers l’autre et par force désirs de rassemblements, de communions. L’homme est ainsi devenu souffrance de lui-même en l’autre. Neptune — gouverneur du signe des Poissons— symbolise les puissances de l’ombre, l’inspiration, les profondeurs océanes d’où peuvent surgir des mémoires ancestrales. Mais la mouvance neptunienne ne contient pas l’influx nécessaire pour incarner les forces de renouveaux ; elle les contient sans parvenir à les concrétiser, à les structurer. Neptune c’est l’élan fusionnel, communautaire mais qui ne réussit pas à donner pleine cohérence à son propre mouvement, d’où les troubles, les états confusionnels et les dissolutions permanentes ; dissolutions comme aboutissements inéluctables. D’où aussi toutes ces ramifications de courants psychiques qui brouillent la perception ascendante et par voie de conséquence se retournent contre eux-mêmes.

Uranus, en revanche, c’est le Feu primordial, le décentrage (le Soleil symbole du moi est en exil en Verseau) car il rompt systématiquement avec les forces de rassemblements, il se place en « écart absolu ». La fusion ne pouvant entraîner que son exil vers le bas, il ressent de ce fait un besoin impérieux et constant d’ascension, d’autodépassement (non dans l’acception de remporter une victoire sur soi mais plutôt dans la volonté de ne pas en rester là…) et de désenchaînèrent (que les chaines soient affectives, morales, idéologiques). Il contient en lui le possible de la re-naissance parce que porteur de sa propre co-naissance, de ce feu prométhéen apte à transmuer les puissances neptuniennes en forces-vie ; le transfert de l’énergie-matière en énergie-conscience.

De telles perspectives me laissent songeur et en même temps plein d’espoirs. Ne sera-ce pas là le commencement de la véritable Révolution, la réalisation de la liberté libre ? L’homme ne se sentira plus prisonnier dans le temps et l’espace, mais prendra conscience que le temps et l’espace sont en lui. Une transcendance à ciel ouvert en somme. Une humanité en tonalité harmonique entre Uranie et Orphée où l’être atteindra — peut-être (?) — ce fameux point de l’esprit « le point suprême ». (…) Le tout petit peu de conscience que nous avons réunie en un paquet dénommé « je suis » nous l’enfermons dans une maison dont toutes les fenêtres sont murées, sauf une, à laquelle nous donnons la forme d’une étoile, d’une croix, d’un croissant, de triangles ou d’autre chose, et nous attendons que la vie nous emporte par là. Mais le voyageur de la nuit qui passe d’aventure ne voit ni la fenêtre, ni même la maison, car il est au-delà du Temps et de l’Espace.

Fabrice PASCAUD (in revue Supérieur Inconnu n°16, 1999).

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : La parole est toujours à Benjamin PÉRET n° 41