Gwen GARNIER-DUGUY
Gwen Garnier-Duguy est né le 2 octobre 1972 à Morlaix, dans ce Finistère, qu’il habite toujours, autant que ce dernier l’habite. Gwen nous dit : « Je suis né à côté de la mer. Je puis me définir comme un homme du littoral, et non comme un marin. L’homme du littoral est celui qui marche sur la frontière entre la terre et la mer. Et cette frontière se meut avec les marées. Tout cela est entré de façon symbolique dans mon esprit, l’a façonné. La mer occupe donc dans mon inconscient une ouverture fabuleuse. Elle me renvoie à la possibilité d’évasion, celle d’un espace salvateur lorsque le simulacre du spectacle entend dominer toute la terre. La mer me renvoie également à l’espace du dedans, car bien que je sois breton, la mer, pour moi, c’est d'abord la méditerranée, c’est à dire la « mer entre deux terres », c'est à dire la mer intérieure. Cette aire est mon espace mental, celui dans lequel je me plonge pour puiser dans ses profondeurs et, comme les dauphins, jouer avec la surface pour y expirer les trésors parfois entrevus. » La Bretagne ? « Elle est ma terre natale. J’y suis attaché, au-delà de la culture celtique, parce qu’elle me lie à la matière de Bretagne, la Légende, et la légende d’Arthur, Excalibur, la Table Ronde, la chevalerie héroïque tournée vers la Dame, les sept forêts dont parle Hugo dans Quatre-Vingt Treize, et Brocéliande. C’est une terre poétiquement tellurique, dont les ciels lumineusement chargés dialoguent dans une langue inconnue avec les sols sous lesquels se trame quelque indicible enjeu. Cette langue inconnue a donné lieu à des traductions défiant la raison même. Elle continue d'avoir sur moi cette attraction surnaturelle. »
Gwen Garnier-Duguy a publié ses premiers poèmes en 1995 dans la revue surréaliste, fondée et dirigée par Sarane Alexandrian, Supérieur Inconnu. Ses poèmes ont par la suite été publiés dans différentes revues, dont Sarrazine, La Sœur de l'Ange, Les Cahiers du sens, La main millénaire, Les Hommes sans Épaules ou Nunc. Gwen Garnier-Duguy a cofondé, avec Matthieu Baumier, en mai 2012, le magazine en ligne (à présent dirigé, depuis 2016, par Carole Mesrobian et Marilyne Bertoncini) Recours au poème (www.recoursaupoeme.fr), qui est exclusivement consacré à la poésie et aux mondes poétiques.
C’est dans le « cœur inépuisable du désir » et non dans la vanité des besoins que réside, pour Gwen Garnier-Duguy, l’essentiel de la vie. D’où l’importance des territoires qui ne peuvent être qu’intérieurs. « Le Poème veut d’abord la vie puisqu’il est identique à la vie, il en est sa représentation imagée et fondatrice. Contre tout ce qui tente d’attenter à la vie, et notamment en notre époque de nihilisme, le poème se défend comme il s’est toujours défendu, pour continuer à vivre. Dans son âme, le poème est essentiellement un être de guerre sur le fil de l’incertitude et du désastre, capable, et c’est en cela qu’il est éblouissant, d’incarner à travers son essence guerrière l’établissement du merveilleux par le merveilleux, sans quoi il n’y a plus ce qu’on nomme traditionnellement la vie. Daumal avait déjà en son temps appelé à la guerre sainte intérieure… Contrairement à Michel Houellebecq, je ne pense pas que la carte ait plus de valeur que le territoire. Le territoire, c’est la réalité, la vie même », explique le poète, qui évoque un terreau fertile enfoui en chacun de nous et destiné à renouveler la floraison du monde : Tu as le paradis / sur le bout de la langue / l'écorce des jardins délicieux / pour paume de la main.
Christophe DAUPHIN
(Revue Les Hommes sans Epaules).
À lire : Nox, roman (Le Grand Souffle, 2006), Nova Roma, co-écrit avec Matthieu Baumier, roman (Black Coat Press, 2009), Danse sur le territoire, amorce de la parole (l’Atlantique, 2011), Le corps du monde (Corlevour, 2014), La nuit phœnix, livre numérique (Recours au Poème éditeurs, 2015), Alphabétique d’aujourd'hui (L’Atelier du Grand Tétras, 2018), Enterre la parole / La nuit Phoenix (Corlevour 2019), Prix International de poésie francophone Yvan GOLL 2020.
"Gwen Garnier-Duguy et Recours au Poème", entretien in Terre à ciel, poésie d'aujourd'hui.