Henry MILLER

Henry MILLER



Henry Miller (Heinrich Miller de son vrai nom) est né le 26 décembre 1891, à New York, où il grandit (quartier de Brooklyn) dans un environnement allemand catholique. Sa jeunesse, après de brèves études, est marquée par l'errance : il enchaîne les petits boulots (employé chez son père qui est tailleur, responsable des coursiers à la Western Union Telegraph…)

En 1924, il abandonne tout et décide de se consacrer totalement à la littérature. Des lâcheurs de proie pour l’ombre, dupes et victimes d’un système à fabriquer des malheureux ; c’est le constat que dresse Miller dans sa jeunesse, qui ne pense qu’à empoigner la vie et la savourer. Il réalisera son rêve à Paris, après avoir compris que plus encore que mordre la vie, il désire exprimer ce qu’il pense et ressent. Sa nature ardente l’y aidera.

En 1928, Henry Miller se rend en Europe et en 1930 s'installe en France où il vit jusqu'à ce qu'éclate la Seconde Guerre mondiale. Ses premières années de bohème à Paris sont misérables, Miller devant lutter contre le froid et la faim alors qu'il vit à la cloche. C’est à Paris qu’il écrit son premier chef-d’œuvre : Tropique du Cancer (une chronique de son quotidien et de ses errances parisiennes, rythmés par des repas gargantuesques et des rencontres féminines bien entendu torrides, le tout appuyé par une langue poétique et directe. Une révolution dans le monde de la littérature. Un livre unique, incandescent et frontal). Ce roman publié en 1934, entraîne aux États-Unis des procès pour obscénité, selon les lois contre la pornographie en vigueur à l'époque. Miller lutte contre le puritanisme et fait beaucoup pour libérer les tabous sexuels dans la littérature américaine, à la fois d'un point de vue moral, social, et légal. Ses œuvres suivantes seront toutes censurées aux États-Unis pour obscénité. Il publie Printemps noir (1936), puis Tropique du capricorne (1939), qui parviennent à se diffuser aux États-Unis, vendus sous le manteau, contribuant à forger sa réputation d'écrivain underground.

Miller retourne à New York en 1940, puis, après la publication du Cauchemar climatisé (portrait de l'Amérique sous cellophane, énorme pamphlet contre le confort et la bourgeoisie, le meilleur exemple de ce qu'est la vie pour Miller) et du Colosse de Maroussi (relation d'un voyage en Grèce, qui dévie peu à peu vers une ode au cosmos et à la vie, à travers le portrait de quelques personnages hauts en couleurs. Le lyrisme millerien dans toute sa grandeur, poignant et immense), en 1941, s'installe à Big Sur (Californie) en 1944, où il continue à produire une littérature puissante, colorée et socialement critique.

L’ostracisme dont les Américains avaient frappé une œuvre vigoureuse mais jugée choquante par les milieux puritains pour sa liberté d’expression (Miller y raconte Miller) est levé en 1961, et Miller connaît ouvertement dans son pays natal la même vogue qu’en Europe.

L’œuvre d’Henry Miller est marquée par des romans largement autobiographiques, dont le ton cru et sensuel a suscité une série de controverses dans une Amérique puritaine dont Miller a voulu stigmatiser l'hypocrisie morale. Son écriture virulente et scandaleuse a profondément marqué les écrivains de la Beat Generation. Miller dénonce un mode d’existence de mort au lieu d’un univers vivant où toutes les forces humaines devraient entrer en jeu, où seraient réconciliés l’ange et la bête qui sont en nous.

On comprendra donc mieux ce qui put le rapprocher des jeunes poètes du groupe des HSE, alors basé à Avignon ; ville qu’il connaissait parfaitement, pour y avoir séjourné à plusieurs reprises, dont durant l’été 1953. En 1954, il se lie d’amitié avec Jean Breton, tout en s’étonnant avec enthousiasme du titre de la revue : « Sans épaules, que voulez-vous dire par cela ? Mais étant jeunes, vous avez – ce qui n’est plus notre cas, à nous les vieux – des ailes ! » Henry Miller écrivit le texte-manifeste « Recoupement sur Avignon », pour les HSE. Son amitié et son influence, ne se sont jamais démenties au sein de notre histoire. Henry Miller est décédé le 7 juin 1980 à Pacific Palisades (Californie).

Christophe DAUPHIN

(Revue Les Hommes sans Épaules).



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Numéro spécial LES HOMMES SANS EPAULES 1ère série, 1953-1956 n° 3