Mikhaïl BOULGAKOV

Mikhaïl BOULGAKOV



Mikhaïl Afanassievitch Boulgakov (1891-1940) exerça tout d’abord comme médecin durant la Première Guerre mondiale, la Révolution russe et la guerre civile russe. À partir de 1920, il se consacra au journalisme et à la littérature. Il fut confronté, tout au long de sa carrière, aux difficultés de la censure soviétique.

Mort jeune à l’âge de quarante-huit ans, Boulgakov a écrit pour le théâtre et l’opéra, mais il est surtout réputé pour ses œuvres de fiction, ses romans, tels que, La Garde blanche (1925), Le Roman de monsieur de Molière (achevé en 1933, publié en URSS, de manière expurgée, en 1962 et de manière intégrale en 1989), ou encore Cœur de chien (1925, publié en URSS en 1987).

S'il fut incompris et méconnu de son vivant, Boulgakov est aujourd’hui salué en Russie et ailleurs comme l’égal d’un Gogol, d’un Tchekhov ou d’un Dostoïevski. L’œuvre de Boulgakov est un chant né du silence. Parce qu’il n’a pas voulu insérer sa voix dans le chœur dirigé par le maître du Kremlin, Boulgakov fut condamné à écrire pour son tiroir.

À sa mort, en 1940, on ne voyait en lui que l’auteur d’une pièce de théâtre, mais déjà les conditions étaient réunies pour que naisse un mythe : peu à peu sortirent de l’ombre des ouvrages dont la somme constitue le plus assourdissant démenti à toutes les formes de pessimisme. À mesure qu’elle était révélée, l’œuvre de Boulgakov - instrument de la libération intérieure d’un écrivain isolé, muselé, persécuté - apparaissait comme un acte de foi dans les plus hautes valeurs humaines. Mais le grand œuvre de Boulgakov demeure Maître et Marguerite, roman sur lequel il travailla jusqu’à sa mort. 

Le roman parut dans la revue Moskva en 1966-1967, amputé d’un bon tiers, pour cause de censure. Plusieurs fois réécrit et retravaillé entre 1928 et 1940, publié en URSS dans son intégralité pour la première fois en 1973 ; le chef d’œuvre de Boulgakov est une relecture du mythe de Faust, transposée dans la Moscou stalinienne des années 1930 : pour retrouver l’homme qu’elle aime, un écrivain maudit – auteur d’une biographie inachevée de Ponce Pilate, Marguerite accepte de livrer son âme au diable.

Maître et Marguerite fut le grand événement littéraire de la période du « Dégel ». Les Russes furent sidérés d’y découvrir une représentation à la fois délirante et plus vraie que nature de la réalité stalinienne dans laquelle ils étaient encore plongés, et qu’ils avaient fini par ressentir comme plus ou moins « normale ». Ils furent, aussi, incroyablement fiers de ce livre vite reconnu comme un chef-d’œuvre. 

Christophe DAUPHIN

(Revue Les Hommes sans Epaules).

Œuvres de Mikhaïl Boulgakov en français : La Garde blanche, la Vie de Monsieur Molière, Le Roman théâtral, (Collection Bouquins, Robert Laffont, 1993) ; La Garde blanche, Nouvelles, récits, articles de variétés (Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1997) ; Ecrits autobiographiques (Actes Sud, 2000), Le Maître et Marguerite et autres romans suivis de Théâtre (Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 2004).



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : Nikolaï PROROKOV & les poètes russes du Dégel n° 44