NOVALIS

NOVALIS



Friedrich von Hardenberg (1772-1801) est le deuxième garçon d'une famille de onze enfants, né de Heinrich Ulrich Erasmus Freiherr von Hardenberg (1738 - 1814) et d'Auguste Bernhardine Freifrau von Hardenberg, née von Bölzig (1749 - 1818).
 
Novalis est un pseudonyme que choisit le jeune homme en 1798 pour sa première publication importante, Blüthenstaub, (Grains de pollen), ensemble de fragments poétiques et philosophiques parus dans la revue des frères Schlegel, L'Athenaeum. Ce pseudonyme se réfère au nom d'un domaine familial ancestral (de novale), il désigne également en latin le terrain en friche. Novalis est né sur le domaine de son père à Oberwiederstedt en Saxe prussienne. Ses parents étaient affiliés à l'Église des Frères Moraves (Herrnhuter) et son éducation religieuse stricte se retrouve largement dans ses travaux littéraires.
 
Du gymnasium (équivalent du lycée) d'Eisleben, il passa en 1790 à l'Université d'Iéna, en tant qu'étudiant en philosophie, où il se lia d'amitié avec Friedrich von Schiller. Puis il étudia le droit à Leipzig, où il devint l'ami de Friedrich Schlegel en 1792, puis à Wittenberg où, en 1794, il obtint sa licence. Le jeune Novalis rencontre en 1795 le philosophe Fichte chez Niethammer, en compagnie d'Hölderlin, autre grande figure de poète philosophe de l'époque. L'œuvre de Fichte, La Doctrine de la Science (Die Wissenschatslehre), consacrée au Moi libre et créateur, a exalté et fasciné la jeune génération. Le cousin du père de Novalis, le ministre prussien Hardenberg, offrit à Novalis un poste gouvernemental à Berlin ; mais son père, craignant l'influence des hommes d'État dépravés, l'envoya apprendre l'aspect pratique de sa profession sous la direction du Kreisamtmann (administrateur du district) de Tennstedt, près de Langensalza.
 
À Tennstedt, Novalis rencontre la jeune Sophie von Kühn (alors âgée de 12 ans), avec laquelle il se fiance secrètement en 1795. La mort prématurée de la jeune Sophie, survenue en 1797, bouleversa Novalis qui vécut cette disparition comme une authentique expérience mystique, philosophique et poétique. Dans le bref et bouleversant Journal qu'il tient après la mort de Sophie, Novalis rapporte à la date du 13 mai 1797 la vision transfiguratrice qui est à l'origine d'un des plus grands textes lyriques du Romantisme, les Hymnen an die Nacht (Hymnes à la Nuit, première publication en 1800 dans l' Athenäum). Quelques mois après la disparition de Sophie, il entra à l’École des mines de Freiberg pour suivre une formation d'ingénieur très complète. C'est là qu'il apprend le calcul différentiel, la chimie et surtout la géologie, sous la direction d'Abraham Gottlob Werner (1750-1817), qu'il immortalisa sous les traits du « Maître » (Meister) dans le texte Die Lehrlinge zu Sais (Les Disciples à Saïs). Il se fiança de nouveau en 1798, avec Julie von Charpentier. Les trois dernières années de sa brève existence furent extrêmement fructueuses en termes de création poétique et de spéculation philosophique. À l'automne 1799, il lut à Iéna devant un cercle admiratif de jeunes poètes romantiques ses Geistliche Lieder, dont certains, comme Wenn alle untreu werden, Wenn ich ihn nur hab ou Unter tausend frohen Stunden sont aujourd'hui encore très populaires et utilisés en tant qu'hymnes religieux. En 1800, il fut nommé Amtshauptmann (magistrat local) à Thuringe, et se préparait à se marier avec Julie von Charpentier lorsqu'il contracta une phtisie. Il mourut l'année suivante à Weißenfels (son ami Friedrich Schlegel assista à ses dernières heures).
 
Dès 1802, ses premières œuvres allemandes furent publiées en deux volumes par ses amis Ludwig Tieck et Friedrich Schlegel. L'édition allemande historique et critique de référence des Novalis Schriften fut établie dans les années 1960 par Paul Kluckhohn et Richard Samuel.


Œuvre:

L'œuvre de Novalis est aussi bien littéraire, poétique, que philosophique. Ayant très peu publié de son vivant, Novalis est notamment l'auteur de milliers de notes théoriques, alliant science naturelle, poésie, religion, politique et philosophie. Pour l'essentiel, ces notes, prises entre 1798 et 1799, font partie d'un ensemble intitulé Das allgemeine Brouillon (Le Brouillon général). L'esprit encyclopédique de ce premier romantisme, également présent chez Friedrich Schlegel qui projetait une Encyclopédie littéraire, rapproche d'une certaine façon ce romantisme de la philosophie systématique de l'idéalisme allemand.

Traductions françaises:

Drei Nächte / Trois nuits, trad. Christian Désagulier, Berlin, Ed. Cyanpress 2010. Le monde doit être romantisé, trad. Olivier Schefer, Paris, Allia, 2008. Art et Utopie. Les derniers fragments, 1799-1800, trad. Olivier Schefer, Paris, École Normale Supérieure,collection Aesthetica, 2005. Semences, trad. Olivier Schefer, Paris, Allia, 2004. Le Monde doit être romantisé, trad. Olivier Schefer, Paris, Allia, 2002. Le Brouillon général, trad. Olivier Schefer, Paris, Allia, 2000. Journal intime (précédé de Clarisse), trad. Armel Guerne, Éditions Mercure de France, 1997. Hymnes à la nuit et Cantiques spirituels, trad. Raymond Voyat, Éditions Orphée/La Différence. Lettres de la vie et de la mort (1793-1800), trad. Catherine Perret, Éditions du Rocher, 1993. Les Disciples à Saïs et les Fragments, trad. Maurice Maeterlinck, Bruxelles, Paul Lacomblez, éd. 3, 1895, en ligne sur Gallica ; Paris, José Corti, 1992 (dernière édition). Les Disciples à Saïs, Hymnes à la nuit, Chants religieux, trad. Armel Guerne, Éditions Gallimard, 1980. Les Fragments (collection bilingue), trad. Armel Guerne, Paris, Aubier Éditions Montaigne, 1973. Œuvres Complètes, trad. Armel Guerne, 2 volumes, Paris, Gallimard, 1975. L'encyclopédie, trad. Maurice de Gandillac, Paris, Minuit, 1966 (1991, dernière édition). Henri d'Ofterdingen / Heinrich von Ofterdingen (collection bilingue), trad. Marcel Camus, Aubier Éditions Montaigne, 1988. Les Disciples à Saïs (trad. Maurice Maeterlinck), Heinrich von Ofterdingen, in Romantiques allemands, Gallimard, coll. "La Pléiade", t. I, 1648 p.



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : DIVERS ÉTATS DU LOINTAIN n° 34