Philippe JACCOTTET

Philippe JACCOTTET



Il n'est pas nécessaire de développer une biographie étendue de Philippe Jaccottet (né à Moudon, dans le Canton de Vaud, en 1925) pour donner idée de sa place éminente. Certes, il a été formé sous la bienfaisante influence d’un Gustave Roud. Certes, il a compté au nombre de ses amitiés fidèles quelques grandes figures (par exemple Giuseppe Ungaretti, Yves Bonnefoy, Jacques Dupin, André du Bouchet, Francis Ponge, André Dhôtel, Pierre Leyris, Henri Thomas, Jean Starobinski, Pierre-Albert Jourdan…). Mais c’est en lui-même, tout en partageant la douleur des humains et peut-être surtout en dialoguant avec le silence des «choses» – entre toutes, celles de la «nature», celles dont il s’est entouré en installant, dès 1953, sa vie et sa pensée dans ce «centre du monde» que fut et reste pour lui la Drôme provençale de Grignan – qu’il a su atteindre le plus haut degré de «vérité» en poésie. Lui-même, d’ailleurs, récuserait l’idée d’un tel accomplissement, tant sa probité créatrice se trouve le plus souvent mêlée de doute : un doute communicatif, car il a su le faire partager à nombre de poètes, les amenant à s’informer sans cesse du degré de légitimité de leur propre parole, de la valeur du mot devant la chose ou le malheur, et aussi à remettre en cause la toute-puissance de l’image envers laquelle il a prôné la méfiance («Méfie-toi des images.», in À travers un verger). Le retrait essentiel de Jaccottet fut, en réalité, «héroïque». Il prenait à contrepied le milieu littéraire et toute l’actualité d’un siècle tapageur à la sensibilité mercantile. Mais il arrive que le pouvoir de l’authenticité renverse les obstacles et que, comme dans les romans de chevalerie, l’épée soit assez droite pour vaincre les monstres : presque malgré lui, le poète a été honoré des prix les plus prestigieux; si l’on considère la seule poésie de langue française du XXème siècle, l’œuvre de Jaccottet est, après celle d’Henri Michaux, le sujet du plus grand nombre de thèses et de mémoires. Le nombre considérable d'articles, de livres, de recueils critiques et d'hommages dans les meilleures revues, témoigne de l'importance d'un poète en passe de devenir un classique, à telle enseigne qu'on l'étudie dans les Terminales et les Facultés, et qu’une édition de ses Œuvres complètes est en préparation dans la collection de La Pléiade.

Œuvres poétiques (dont récits et carnets) :
Requiem, Mermod, 1947. L’Effraie et autres poésies, Gallimard, 1953 dans la collection «Métamorphoses» ; 1979 dans la collection «Blanche». L’Ignorant, Gallimard, 1958. L’Obscurité, Gallimard, 1961. La Semaison, Lausanne, Payot, 1963. Airs, Gallimard, 1967. Paysages avec figures absentes, Gallimard, 1970 et 1976. Chants d'en bas, Lausanne, Payot, 1974. À la lumière d'hiver, Gallimard, 1974. À travers un Verger, illustrations de Pierre Tal Coat, Fata Morgana, 1975. Les Cormorans, gravures de Denise Esteban, Idumée, Marseille, 1980. Des histoires de passage. Prose 1948-1978, Lausanne, Roth & Sauter, 1983. Pensées sous les nuages, Gallimard, 1983. La Semaison, Carnets 1954-1967, Gallimard, 1984. Cahier de verdure, Gallimard, 1990. Libretto, La Dogana, 1990. Poésie, 1946-1967, Poésie/Gallimard, Paris, (1971) 1990. Requiem (1946) ; suivi de Remarques (1990), Fata Morgana, 1991. Cristal et fumée, Fata Morgana, 1993. À la lumière d'hiver ; précédé de Leçons ; et de Chants d'en bas ; et suivi de Pensées sous les nuages, Gallimard, 1994. Après beaucoup d'années, Gallimard, 1994. Autriche, Éditions L'Âge d'homme, 1994. Eaux prodigues, Nasser Assar, lithographies, La Sétérée, J. Clerc, 1994. La Seconde Semaison : carnets 1980-1994, Gallimard, 1996. Beauregard, postface. d'Adrien Pasquali, Éditions Zoé, 1997. Paysages avec figures absentes, Gallimard, (1976) 1997, coll. « Poésie ». Observations et autres notes anciennes : 1947-1962, Gallimard, 1998. À travers un verger ; suivi de Les cormorans ; et de Beauregard, Gallimard, 2000. Carnets 1995-1998 : la semaison III, Gallimard, 2001. Notes du ravin, Fata Morgana, 2001. Et, néanmoins : proses et poésies, Gallimard, 2001. Nuages, Philippe Jaccottet, Alexandre Hollan, Fata Morgana, 2002. Cahier de verdure ; suivi de Après beaucoup d'années, Gallimard, coll. « Poésie/Gallimard », 2003. Truinas / le 21 avril 2001, Genève, La Dogana, 2004. Israël, cahier bleu, Fata Morgana, 2004. Un calme feu, Fata Morgana, 2007. Ce peu de bruits, Gallimard, 2008. Le Cours de la Broye : suite moudonnoise, Moudon, Empreintes, 2008. Couleur de terre, par Anne-Marie et Philippe Jaccottet, Fata Morgana, 2009. La promenade sous les arbres, Éditions La Bibliothèque des Arts, 1er octobre 2009 (1re édition : 1988). Le retour des troupeaux et Le combat inégal dans En un combat inégal, La Dogana, 2010. L'encre serait de l'ombre, Notes, proses et poèmes choisis par l'auteur, 1946-2008, Gallimard, coll. « Poésie/Gallimard », 2011.

Paul FARELLIER



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : HORIZONS POÉTIQUES DE LA MORT n° 31