Roberto BOLANO

Roberto BOLANO



Né 28 avril 1953 à Santiago, d’un père chauffeur routier (et boxeur) et d’une mère enseignante, Roberto Bolaño est un enfant maigrichon, myope, plongé dans les livres, dyslexique et souvent tyrannisé par ses camarades à l'école, d’où ressort un sentiment d’exclusion.

En 1968, sa famille s’installe au Mexique, pays où il grandit, avant de revenir au Chili en 1973, quelques mois avant le coup d’État. Arrêté par des militaires sur une route du Sud, il doit son salut à la rencontre inopinée, en prison, d’anciens camarades de collège devenus policiers. Il quitte une nouvelle fois le pays et, pendant vingt ans, voyage au Salvador, aux États-Unis, en Belgique, en France, au Maghreb, effectuant tous les petits boulots possibles, avant de s’installer en Catalogne. Cet itinéraire nourrit ses livres, mais aussi sa réputation de beatnik, qui l’agace ou l’amuse, tour à tour.

Bolaño se défie de Pablo Neruda, Octavio Paz et des figures tutélaires de la littérature hispano-américaine « pères des lettres », leur préférant Quevedo, Borges, Stevenson ou certains romanciers étatsuniens, ceux, qui, chacun à leur manière, ont décrassés le langage et racontés des histoires « avec une langue cuite à l’os ». Chacun a tordu le cou à « la canaille sentimentale », engeance que Bolaño apprécie peu.

Son œuvre (une trentaine de volumes, édités en France par Christian Bourgois : poèmes, romans et nouvelles) évoque des ratés enchanteurs, des fous littéraires, des bourreaux latinos déments, des inconnus errant sur la planète avec tendresse et dégoût. Elle parle aussi de lui, de ses aventures, de ses rencontres, avec un ton nouveau : les situations humaines sont pensées par la grâce d’un récit qui les pousse jusqu'à leurs limites, jusqu’à l’absurde. Citons : Les Détectives sauvages, Nocturne du Chili, ou le roman posthume 2666, et encore ses deux séries de nouvelles Appels téléphoniques et Des putains meurtrières.

Roberto Bolaño est mort le 14 juillet, à cinquante ans, d’une maladie hépatique dans un hôpital de Barcelone. Ce grand auteur mélancolique, qui rencontre un succès international, attendait un foie qui n’est jamais venu. Quelques jours avant sa mort, il expliqua à un journal chilien, avec ce ton de prince sans rire désespéré qui le caractérise : « Le docteur dit qu’il m’avisera cinq heures avant la transplantation. Dans ce laps de temps, je devrai demander pardon, faire mon testament et mettre mon âme en marche. »

César BIRENE

(Revue Les Hommes sans Epaules).

 

À lire (en français), aux éditions Christian Bourgois :

Romans : Étoile distante (2002),  Amuleto (2002), Monsieur Pain (2004), Nocturne du Chili (2002), Anvers (2004),  La Piste de glace (2005),  Les Détectives sauvages (2006), 2666 (2008), Un petit roman lumpen (2012), Le Troisième Reich (2010).

Nouvelles, essais : Conseils d'un disciple de Morrison à un fanatique de Joyce, suivi de Journal de bar (2009), La Littérature nazie en Amérique (2003), Appels téléphoniques (2004),  Des putains meurtrières (2003), Le Gaucho insupportable (2004), Le Secret du mal (2008), Entre parenthèses, chroniques et articles (2012).

Poésie : Les Chiens romantiques (2012), Trois (2012).

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : Poètes chiliens contemporains, le temps des brasiers n° 45