Werner LAMBERSY

Werner LAMBERSY



Dans son anthologie personnelle au merveilleux titre L’éternité est un battement de cils (Actes Sud), le poète a tenu à retracer lui-même les étapes de sa biographie. Pourquoi le remplacerions-nous dans cet exercice ?

Citons-le au contraire : « Naissance de Werner Lambersy le 16 novembre 1941 à Anvers, de Juliette Rosillon (1916-1983) et d’Adolf Lambersy, employé (1913-2002). Pneumonie. 1942 : A. L. s’engage dans la Waffen SS, ce qui lui vaudra une condamnation à vingt ans de réclusion. J. R., de tradition juive et franc-maçonne, le "quitte sans vraiment le quitter".

1944 : installation à Bruxelles avec sa mère et sa grand-mère Angélique. 1947 : se remet d’une péritonite aiguë dans le Brabant wallon pendant plus d’un an. 1948: le docteur José Debliquy se met en ménage avec eux. Désormais, on parle français à la maison. 1950 : méningite cérébrale. 1953 : Collège Saint-Michel (Bruxelles). 1959 : J. R. épouse René Naveau, chauffeur routier. 1960 : rencontre Françoise Godard. 1964 : service militaire. 1965 : mariage avec F. G. Pleurésie tuberculeuse. 1966 : naissance de Sandrine. 1973 : rencontre Laura Pozzetto. 1975 : rencontre Patricia Castex-Menier. 1980 : dépression nerveuse et tentative de suicide, hospitalisation. 1982 : installation à Paris. Divorce. 1983 : Mariage avec P. C.-M. ; attaché littéraire au centre Wallonie-Bruxelles à Paris pour la promotion des lettres belges. 1988: naissance d’Aurélia. 1992: naissance de Raphaël.

De 1960 à 2002, a vendu de l’électroménager, de la haute couture, des voitures, du gros matériel de cuisine, des allumettes (quinze ans)... et les livres des autres ; a voyagé sur quatre continents et rencontré de belles amitiés tant masculines que féminines... »

Puissante et proliférante : ainsi pourrait-on dès l’abord qualifier la poésie de Lambersy dans son élan d’écriture vers un univers décidément protéiforme. Poésie du souffle, des mots proférés dans leurs sons et sens indissociables, architecture vocale et vocative; poésie qui d’abord s’arrache, comme physiquement, au corps du poète : « Poème, et son mystère est d’avoir besoin des mots, de ce creux sans paroi, de ces matrices en plein vent qui l’expulseront par pulsations et dans le rythme de spasmes, de cet abri dont le centre est dehors et jeté devant tous » est-il écrit dans Quoique mon cœur en gronde (Éd. Le Cormier, épuisé) ; et de même, poésie qui ne se transmet que perceptible par les sens ; on la respire, on la hume, voire on la caresse comme dans l’amour tel que le veut l’auteur en ses Petits rituels sacrilèges (Éd. L’Amourier): « Il n’y a de vérité que peau à peau. Le regard a beau exprimer, ce n’est qu’une promesse; cela reste de l’ordre de la foi. La peau est de l’ordre des faits.[…] La vérité vient de la peau, même si les yeux, après, en disent plus et surtout les paupières lorsqu’elles se ferment sous l’excès.»

Mais aussi poésie essentiellement voyageuse, itinérante et libertaire. Le poète explore la totalité de l’humain avec une sorte de gravité heureuse qui lui fait secouer les pesanteurs du discours, en vrai coryphée du langage. Un virtuose ici joue et danse dans l’ivresse d’une forme sacrée.

Werner Lambersy, auteur de plus de 70 livres et recueils, est décédé à Paris le 18 octobre 2021, à l'âge de 80 ans.

Paul FARELLIER

(Revue Les Hommes sans Épaules).

Éléments d’une bibliographie limitée aux livres de poésie :


Chez V/D/H : Caerulea (1967). Radoub (1967). À cogne-mots (1968). Haute
tension (1969). Temps festif (1970).
Chez Henry Fagne : Silenciaire (1971). Moments dièses (1972). Groupes de résonances
(1973). Le Cercle inquiet (1973). Protocole d’une rencontre (1975). Trentetrois
scarifications rituelles de l’air (1977). Tous réédités au Taillis-Pré (2004).
Au Cormier : Maîtres et maisons de thé (1979 et 1980) ; en poche, chez Labor
(1988) ; réédition chez Hors commerce (2004). Le Déplacement du fou (1982),
réédition L’Orange bleue (1995 et 2000). Quoique mon coeur en gronde (1985).
Chez Dur-an-ki : Paysage avec homme nu dans la neige (1982). Géographies et
mobiliers (1985), réédition Écrits des forges (1991).
Au Dé bleu : Komboloï et Chandmala (1985 et 1986). Dites trente-trois, c’est un
poème (2000).
À La Table rase / Noroît : Noces noires (1987 et 1989).
Aux Éperonniers : L’Arche et la Cloche (1988 et 1989).
Chez Phi : Architecture nuit (1992). Journal d’un athée provisoire (1996).
L’Horloge de Linné (1999), dessins. Journal par-dessus bord (2004).
Chez Cadex : Entrée en matière (1990 et 1993). Stilb / Iréniques (1994).
Chroniques d’un promeneur assis (1997). Pays simple (1998). Pour apprendre la
paix à nos enfants (2001). Carnets respiratoires (2004).
À L’Arbre à paroles: Volti subito (1992).
À La Bartavelle : Quinines / Grammaire du désordre (1992).
Chez Labor : La Magdeleine de Cahors (1997).
À La Lettre volée : Tirages de têtes (1995).
À L’Amourier: Petits rituels sacrilèges (1998). Écrits sur une écaille de carpe
(1999). Je me noie (2001). Échangerais nuits blanches contre soleil même timide
(2004). Parfums d’apocalypse(2006).
Au Loup de gouttière : D’un bol comme image du monde (1999).
Chez CFC : Singuliers regards (2000).
Chez Syllepse : Puits, cachettes et passages (2002). Traité des corridors (2005).
Chez Maelström : Ecce homo (2002).
Chez Actes Sud : L’éternité est un battement de cils, anthologie personnelle
(2005).
Chez Dumerchez : Coimbra (2005).
Chez À l’index: La nostalgie de l’hérésie(2006).
Chez Rhubarbe : Achill Island note book (2006).
À L’Âge d’homme : La Toilette du mort, suivi de Ezra Loomis Pound (2006).
À La cour pavée : Uluru, ce que me dit le Didjeridoo (2006).
Au Taillis pré : L’Invention du passé(2006).
Chez La Porte : Impromptu de la piscine des amiraux (2008).

Te spectem, avec des peintures de Richard Bréchet, éditions Tipaza, 2009

La Percée du jour, avec des photographies de Yves Picquet, éditions Double Cloche, 2009

Érosion du silence, avec des photographies de Jean-Pol Stercq, éditions Rhubarbe, 2009

Devant la porte, avec des photographies de Claude Allart, éditions du Cygne, 2009

Pluies noires, avec des gravures de Christine Gendre-Bergère, M. Brenner, 2010

Conversation à l'intérieur d'un mur, 2011

Un concert d'Archie Shepp, éditions La Porte, 2011

À l'ombre du Bonsaï, 2012 - L'Âne qui butine

Quelques petites choses à murmurer à l'oreille des mourants, éditions La Porte, 2012

Le Cahier romain, éditions du Cygne, 2012

Pina Bausch, illustrations de Amathéü & Ganz, éditions du Cygne, 2013

Opsimath : la nuit, Rougier, 2013

L'Assèchement du Zuiderzee, éditions Rhubarbe, 2013

Le Mangeur de nèfles : haïkus libres, Pippa, 2014

Déluges et autres péripéties, éditions La Porte, 2014

Dernières nouvelles d'Ulysse, 2015

Escaut ! Salut: suite zwanzique et folkloresque, 2015 - Opium Éditions

In angulo cum libro, Al Manar, 2015, avec Diane de Bournazel

Dernières nouvelles d'Ulysse : avis de recherche, Rougier, 2015

Un requiem allemand 1986, éditions Caractères, 2015

La Perte du temps suivi de On ne peut pas dépenser des centimes, Castor Astral, 2015 - Prix Mallarmé et prix Théophile-Gautier

La Dent tombée de montagne, Dumerchez, 2015

Anvers ou Les anges pervers, récit, Espace Nord, 2015

Epitapheïon, éditions La Porte, 2016

D'un bol comme image du monde, avec illustrations de Lee Ye Ji et Thai Le Dinh, Pippa, 2016

Vie et mort du sentiment étrange d'être dieu, éditions La Porte, 2017

Le Sous-marin de papier, avec des illustrations de Aude Léonard, Møtus, 2017

Lettres à un vieux poète, éditions Caractères, 2017

Hommage à Calder, éditions Rhubarbe, 2017

La Chute de la grande roue, suivi de Les grillons chantent la nuit ; de En dehors et autour ; et de Paresseux Dimanches, Le Castor Astral, 2017

Ball-trap, illustrations Laurence Skivée, 2017 - L'Âne qui butine

Bureau des solitudes, éditions La Porte, 2018

Maîtres et maisons de thé, éditions Rhubarbe, 2019

La Musique à bouche, illustrations de Philippe Bouret, éditions du Petit Véhicule, 2019

Le grand poème, éditions Caractères, 2019

L'Agendada, éditions Rougier, 2019

Brainxit, avec des photographies des sculptures de Wanda Mihuleac, éditions Transignum, 2019.

Les Convoyeurs attendent, journal sauvage, éditions Rhubarbe, 2020

Le festin de vivre, 2020 - L'Âne qui butine

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules




Dossier : ATTILA JÓZSEF et la poésie magyare n° 27

Dossier : Bernard HREGLICH, un réalisme incandescent n° 46

Dossier : Edouard J. MAUNICK, le poète ensoleillé vif n° 53