Les Hommes sans Épaules


Dossier : PIERRE REVERDY et la poétique de l'émotion

Numéro 32
264 pages
Second semestre 2011
17.00 €


Sommaire du numéro



Éditorial : "L'Émotion Encore et Toujours !" par Christophe DAUPHIN

Les Porteurs de Feu : Poèmes de Gabrielle ALTHEN, Frédéric Jacques TEMPLE

Ainsi furent les Wah : Poèmes de Odile COHEN-ABBAS, Monique SAINT-JULIA, Isabelle LÉVESQUE, Katty VERNY-DUGELAY

Dossier : Pierre REVERDY et la poétique de l'émotion, par Christophe DAUPHIN, Poèmes de Pierre REVERDY

Une voix, une œuvre : Christophe DAUPHIN et la géopoésie de l'émotion, par Monique W. LABIDOIRE, Poèmes de Christophe DAUPHIN, Gérard BOCHOLIER, par Paul FARELLIER, Jacques MOULIN, par Éric SÉNÉCAL

Le poème surprise : un poème de Frédéric TISON

Dans les cheveux d'Aoûn : poèmes et proses de Jacques TAURAND, Jean-Claude TARDIF, Félix LABISSE, Alain BRETON

La mémoire, la poésie : Loïc HERRY, par Christophe DAUPHIN

Les pages des Hommes sans Épaules : Poèmes de Elodia TURKI, Paul FARELLIER, Alain BRETON, Christophe DAUPHIN

Le peintre de cœur : Jorge CAMACHO, par Karel HADEK

Avec la moelle des arbres : notes de lecture de Jean CHATARD, Paul FARELLIER, Monique W. LABIDOIRE, Jean-Pierre VÉDRINES, Céline WILLOCK, Karel HADEK

La chronique des revues, par César BIRÈNE

Infos / Échos des HSE, par César BIRÈNE

Présentation

L'ÉMOTION ENCORE ET TOUJOURS !

"Poètes de l’émotion et de la Poésie pour vivre, autrement dit : émotivistes, nous nous sentons proches de l’auteur de Sources du vent, car, nous l’avons déjà écrit (in Jean Breton ou le soleil à hauteur d’homme, Les HSE n°22, 2006), un « homme sans épaules », à la manière de Reverdy, ne se retranche jamais derrière la littérature pour faire exulter son imaginaire. Écrire, c’est vouloir se fouiller, plaider pour soi-même, rencontrer autrui au plus profond, donc communiquer, dénoncer aussi les aliénations, laver le vocabulaire, promouvoir en rêve des gestes qui deviendront un jour des actes. L’émotivisme est une attitude devant la vie, une conception du vivre qui ne saurait être détachée de l’existence du poète, car la création est un mouvement de l’intérieur à l’extérieur et non pas de l’extérieur sur la façade. L’émotivisme est un art de vivre et de penser en poésie, car une œuvre est nulle si elle n’est qu’un divertissement et si elle ne joue pas, pour celui qui la met en question, un rôle prépondérant dans la vie. Nous parlons bien sûr d’une poésie qui se soucie fort peu des déviations qui ont pour nom recherche esthétisante, logorrhée langagière et autres, ou de celles qu’un monde, rendu moins sensible par l’usage systématique de sentiments réduits à des figures de style, lui a imposées envers et contre tous ceux pour qui la poésie est un enjeu fondamental. À travers l’émotivisme, nous actualisons, développons et augmentons de nos propres acquis, les actions de nos aînés. Tout ce qui est vivant doit se renouveler pour continuer à vivre. Tout ce qui ne se renouvelle pas meurt. C’est cela une filiation poétique et non un respect de décrets et de mots d’ordre qui, d’ailleurs, n’existent pas. La poésie émotiviste – qui est la création, par une œuvre esthétique (grâce à une certaine association de mots, de couleurs ou de formes, qui se fixent et assument une réalité incomparable à toute autre), d’une émotion particulière que les choses de la nature ne sont pas en mesure de provoquer en l’homme –, ne peut que rejoindre la création de Pierre Reverdy, pour qui, la poésie n’est pas dans les choses, mais uniquement dans l’homme ; et c’est ce dernier qui en charge les choses, en s’en servant pour s’exprimer..."

 
Christophe DAUPHIN

(extrait de l'éditorial, L'Émotion Encore et Toujours !, in Les Hommes sans Epaules n°32, 2011).

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Tu ne veux pas apaiser de ta main le soir qui se dédore
Tu ne peux pas teinter de ton chagrin l’ennui qui me dévore
Tu ne peux pas ouvrir
Et pas même oublier
Sortir de la saison
Quand l’orage est calmé
L’ombre qui tombe sans souffrir
Et l’angle des épaules
La patience longtemps limée
Ma main à peine décidée
Caresse cette idole
Sur le tranchant des jours
Les lames de rechange
L’acier de mon amour
Qui plie et tremble
Les éclairs parfumés
Et la peur des détours
Pour ne pas glisser

Pierre REVERDY

(in Les Hommes sans Epaules n°32, 2011).

 


GLOSE LINGUALE


Je t’exhorte, je t’abstrais,
je te délarde, verge miellée, mon éloquence, ma robe de soir,
à petits coups de cœur et d’apnée,
je te réduis à un dé de manne,
à une raie, à un fil d’archal.
Je t’érode, églogue, sonnet salant,
verge des harangues, des exordes imposants,
je t’étaye,
je te borne à la clairvoyance.
Matin minuit, transit mourant,
je te dégraisse dans le puits de ma langue,
aplatie sur ton nerf, camériste implacable, je te déguise en limon,
en son sein huant,
à bout de souffle je t’invective, sexe expansif,
un bandeau d’eau mutine migrant entre mes cuisses.
Convoques-tu une nouvelle session de papilles
pour exalter tes rites, tes redites,
ô ma bouche mutante, ma babillarde,
accourt dans son plus vif équipage,
et en rythme te dégrade, te jette à bas.
Es-tu heureuse de mes virevoltes, mes contresens ?
Vas-tu briser mon équivoque,
mon balancement,
quand ton désir me monte au cœur,
me verse sa berceuse libertine dans le sang.
 

Odile COHEN-ABBAS

(in Les Hommes sans Épaules n°32, 2011).



Revue de presse

2011 – À propos du numéro 32

    « Le directeur de publication, Christophe Dauphin, infatigable animateur de la revue et agitateur du Landerneau, y joue une nouvelle fois un rôle important. Après un éditorial fleuve de quatre pages qui enfonce le clou de l’émotivisme en y associant largement Reverdy, il consacre au poète de Solesmes un long dossier de plus de trente pages augmenté de photographies et de trois poèmes inédits, puis plus de vingt pages à Loïc Herry (1958-1995)... La revue contient bon nombre d’autres raisons de satisfaction : des articles dont celui, remarquable, d’Éric Sénécal sur Jacques Moulin ; des notes de lecture sur une trentaine de pages par sept contributeurs, et des poèmes, bien sûr. Ceux des poètes présentés en dossier, mais d’autres encore, tels Gabrielle Althen et Frédéric Jacques Temple, le regretté Jacques Taurand (Ne jetez pas la pierre, posez-la à côté d’une autre : c’est déjà le commencement de l’édifice), Jean-Claude Tardif, et quatre femmes de la tribu des Wah, autrement dits les-Hommes-sans-épaules. Les dernières pages Infos / Échos des HSE donnent l’actualité - parfois dépassée, pour des raisons de délais de publication, mais la poésie a le temps - des HSE et de ses membres. Une revue indispensable. »

    Jacques Fournier (levure littéraire.com, décembre 2011).

    " Les Hommes sans Épaules n°32, c’est comme chaque fois une quasi encyclopédie de la plus belle modernité. Ou émotivité dirait Christophe Dauphin, présenté par Monique Labidoire comme Gérard Bocholier l’est par Paul Farellier et Jacques Moulin par Éric Sénécal. Un dossier-étude très complet aura rendu jaloux Claude Cailleau, tellement féru du même poète, « Pierre Reverdy et la poétique de l’émotion », décortiqué cette fois par Christophe Dauphin, qui présente Loïc Herry « poète des falaises ». Comment se passer de ce passeur d’hommes (comme on dirait en 14-18 !) qui est aussi un diable d’homme ? On deviendrait émotiviste !"

    Paul Van Melle (Inédit Nouveau n°254, jan/fév 2012).

    " Les Hommes sans Épaules n°32, c'est "l'émotion, toujours l'émotion"! On l'aura deviné, ici, un dossier est consacré à ce grand poète Pierre Reverdy, par Christophe Dauphin. Dans "Une Voix, une œuvre", Éric Sénécal nous parle de Jacques Moulin, poète discret et sincère; quant au "Peintre de cœur", il s'agit de Jorge Camacho, peintre surréaliste cubain. À lire aussi dans "Les Cheveux d'Aoun", les proses de Jacques Taurand, J.-C. Tardif, Félix Labisse et Alain Breton."

        Jean-Michel Bongiraud (Pages Insulaires n°23, février 2012).

       "Des poèmes de Frédéric Jacques Temple et de Gabrielle Althen, ouvrent le n° 32 des HSE. Quatre femmes pour la partie anthologique (Les Wah), qui suit : Odile Cohen-Abbas, Monique Saint-Julia, Isabelle Lévesque, Katty Verny-Dugelay. Toute la vie (littéraire ou non) de Pierre Reverdy, par Christophe Dauphin : c'est clair, nombreuses images et trois inédits de Reverdy. Côté études ("Une Voix, une œuvre") : L'œuvre de Christophe Dauphin, étudiée par Monique Labidoire; celle de Gérard Bocholier, par Paul Farellier; et celle de Jacques Moulin (bien connu des lecteurs de Verso), par Éric Sénécal: que de livres publiés à eux trois !"

          Christian Degoutte (Verso n°148, mars 2012).