Mario DE ANDRADE

Mario DE ANDRADE



Mário Raul Moraes de Andrade (São Paulo, SP, 1893-1945), considéré comme le père de la poésie brésilienne moderniste, est impliqué dans presque toutes les formes d’expression du mouvement. Avec Dina Dreyfus (épouse de Lévi-Strauss), il fonde la première société d’ethnologie du Brésil[1]. Il est un pionnier dans le domaine de l’ethnomusicologie.

Ses photographies et ses essais consacrés à une large variété de sujets, de l’histoire à la littérature et à la musique, sont largement publiés et diffusés. À la fin de sa vie, Andrade devient le Directeur fondateur du Département de la Culture de São Paulo. En 1917, il publie son premier recueil de poèmes, Há uma Gota de Sangue em Cada Poema, « Il y a une goutte de sang dans chaque poème », sous le pseudonyme de Mário Sobral. Le livre, encore influencé par la tradition européenne et particulièrement française, porte toutefois déjà les marques d’une identité brésilienne distinctive. La même année, il se lie d’amitié avec Oswald de Andrade qui le fait connaître au public.

En 1922, il publie Paulicéia desvairada, « São Paulo détraquée ». Il inaugure avec cette œuvre une incorporation du langage populaire dans le poème. Les vers, de longueur et structure syntaxique variées, sont essentiellement des descriptions impressionnistes et fragmentées, parsemées de morceaux de dialogues dans le dialecte de São Paulo. Mário de Andrade précise ensuite son projet poétique de réinterprétation de la culture de son pays avec les recueils A escrava que nao é Isaura, « L’esclave qui n’est pas Isaura » (1925) et Losango cáqui, « Losange kaki » (1926), caractérisés par la subversion de thèmes traditionnels, la valorisation du quotidien et l’écriture elliptique.

Tout au long des années 1920, Andrade poursuit ses voyages à travers le Brésil, étudiant la relation entre la musique « artistique » et celle des rues et des campagnes qui inclue les rythmes afro-brésilien et amérindien. En 1927, il commence la rédaction d’un carnet de voyage intitulé O Turista Aprendiz, « L’Apprenti Touriste », publié dans le journal O Diário Nacional, « Le Quotidien National » et illustré par de nombreuses photographies de paysages et d’habitants prises par lui-même.

En 1928, il publie son roman majeur, Macunaíma, dans lequel il applique à la fiction en prose la technique d’écriture qu’il avait développée dans Paulicéia Desvairada. Le roman, qui annonce d’une certaine manière le réalisme magique, mêle des descriptions de la jungle et de la ville. L’« anthropophagie » est au centre de l’œuvre, qui est aussi une réflexion sur le pouvoir et l’aliénation.

En 1929, il se brouille avec Oswald de Andrade. Malgré les tentatives répétées de rapprochement de ce dernier, ils ne se réconcilieront jamais. En 1937, avec la prise de pouvoir de Getúlio Vargas, Mário est démis de ses fonctions au Département de la Culture.

En 1938, il déménage à Rio de Janeiro pour prendre un poste à l’Université Fédérale. En 1941, il retourne à São Paulo, où il travaille sur l’édition d’un recueil rassemblant son œuvre poétique. Le dernier projet d’Andrade est un long poème intitulé Meditação Sôbre o Tietê[2], « Méditation sur le Tietê ». Il s’agit d’un poème épique et d’amour qui compare le Tietê au Tage et à la Seine, et São Paulo à Lisbonne et Paris, comme pour affirmer la position internationale d’Andrade lui-même.

Oleg ALMEIDA et Philippe MONNEVEUX

(Revue Les Hommes sans Epaules).


[1] C’est grâce à son influence que Dina et Claude Lévi-Strauss obtiennent la permission d’entreprendre des missions de recherche dans l’intérieur du pays, qui inspireront à ce dernier « La Vie familiale et sociale des Indiens Nambikwara » (1948).

[2] Fleuve traversant São Paulo.



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
DOSSIER : La poésie brésilienne, des modernistes à nos jours n° 49