Paul PUGNAUD

Paul PUGNAUD



Paul Pugnaud est un enfant posthume, puisque son père André Pugnaud, négociant en vins de Banyuls et en vin de messe, meurt d’une crise cardiaque avant sa naissance, le 2 juillet 1912 à Banyuls-sur-Mer. Après une petite enfance à Banyuls ,entre la mer et les vignes, la famille s’installe à Perpignan. Paul Pugnaud suit sa scolarité à l’institution Saint Louis de Gonzague où il obtient le baccalauréat en 1929. Sa famille, par un grand-oncle maternel, est liée d’amitié à Aristide Maillol, le sculpteur de Banyuls.

Très jeune, Pugnaud commence à écrire des articles, notamment dans la célèbre revue d'Albert Bausil, Le Coq catalan, où il fait notamment la rencontre du peintre Henri Espinouze et du future poète surréaliste Robert Rius. Le Coq catalan publiera également Joseph Delteil, Jean Cocteau, Max Jacob, Antoine de Saint-Exupéry, Gaston Bonheur ou Charles Trenet. Après son Bac, Pugnaud gagne Paris et s’inscrit en Licence de lettres à la Sorbonne. En 1931 et 1932, il passe six mois à Madrid, pour perfectionner son espagnol. Il y assiste aux débuts de la République espagnole. Sa mère meurt brutalement, début 1933. Il se retrouve orphelin à vingt ans.

Depuis toujours la mer est son milieu de prédilection. Tous les étés il navigue, d’abord à Banyuls, puis en Espagne sur les bateaux d’amis, avant d'acquérir son propre voilier en 1935. Pugnaud fait son service militaire dans la marine en 1934 et 1935, ce qui lui permet de parcourir la Méditerranée de la Grèce à Gibraltar. A partir de 1936, il partage son temps entre Paris et les croisières en bateau qui, en 1938, le mènent en Tunisie, via la Corse et la Sardaigne. Parallèlement, il continue à écrire de la poésie et collabore en plus du Coq catalan, à La Bouteille à la mer. Il publie son premier recueil en 1939 : Equinoxes. La même année, en juillet, il épouse Bernadette Verdier, originaire de l’Aude et étudiante à Paris. Le couple part aussitôt en croisière en Tunisie, où il est rattrapé par la guerre. Paul Pugnaud est mobilisé dans la marine, à Bizerte, jusqu’à l’armistice. Le couple Pugnaud achète un domaine viticole : le Domaine de Belle-Isle, à Lézignan-Corbières, en 1940. Paul Pugnaud apprend le métier de vigneron avec son beau-père Louis Verdier avant son arrestation pour faits de résistance, en 1943. Déporté, Louis Verdier meurt au camp de Buchenwald. Après la guerre Paul Pugnaud partage sa vie entre Lézignan et Banyuls. A partir de 1958, il part en croisière tous les étés sur la côte espagnole. Il traverse l’Atlantique, avec le bateau d’un ami, Jean Bluche, en 1965. Sa fille, Sylvie, nait en 1950.

Tout en s’occupant de son domaine viticole et en s’investissant dans la vie sociale et associative (il devient président du Syndicat des exploitants agricoles de Lézignan, après la guerre, puis co-fondateur et président du yacht-club de Banyuls dans les années 60), il écrit de nombreux poèmes. Le recueil Zone franche, est publié par André Vinas à Perpignan en 1955.  Suivront, chez Subervie: Azur de pierre (1962), qui obtient le prix Ilarie Voronca, puis, La Nuit ouverte (1967). Puis, Pugnaud fait la rencontre coup de foudre de l'éditeur René Rougerie, qui publie Minéral (qui obtient le Prix Antonin Artaud) en 1968. A partir de cette date, René Rougerie va publier un recueil de Pugnaud tous les deux ans. L’œuvre poétique de de ce dernier se construit peu à peu et gagne en force comme en densité, en s’épurant. Au total, René Rougerie publiera quatorze recueils de Paul Pugnaud, qui publiera également en revues:  La Bouteille à la mer, Les Cahiers de la licorne, La Tramontane, Encres vives, Profils, Le Temps parallèle, Jalons, Poésie Présente… Tout en fréquentant les poètes et écrivains du sud. Dans l’Aude: Jean Lebrau, René Nelli, Michel Maurette , Joe Bousquet et Hugues Fouras, le fondateur de La Bouteille à la mer (revue à laquelle Pugnaud a collaboré de 1934 à 1952). Il est également lié avec les poètes de Rodez, réunis autour des prix Ilarie Voranca et Antonin Artaud : Pierre Loubière, Pierre Gabriel, Hénard, Jacques Arnold, Frédéric Jacques Temple… Citons aussi son amitié avec Armand Lanoux, qui est venu passer plusieurs étés à Banyuls.

L'héritage poétique de Paul Pugnaud, poète trop méconnu, n'est pas vain, puisqu'il est aujourd’hui revendiqué par Gwen Garnier Duguy et Matthieu Baumier, les poètes et animateurs (à qui, cette présente notice est entièrement redevable)de la revue en ligne Recours au Poème qui, défendant l'oeuvre et la mémoire du poète vigneron, vont jusqu'à considérer sa poésie comme inspiratrice de leur propre aventure poétique; Gwen Garnier Duguy écrivant même: "L’économie de moyens alliée à la richesse des images met l’esprit du lecteur en mouvement, et celui-ci reçoit l’image non écrite mais suggérée comme de manière chamanique. Que voyons-nous, lorsque les animaux flairent les étoiles ? Cette puissance de suggestion est rare, car Pugnaud écrit en absence, et de ce relief dessiné en creux surgit la présence purement lyrique de ce qui doit toujours demeurer caché. Seul un chaman des profondeurs peut ainsi convoquer les sortilèges du langage et en user pour la guérison du monde et non pour son aliénation, pour « répandre autour du monde/Une fraîcheur sur chaque pierre ». La ligne rouge commune à ces poèmes, par-delà le temps, c’est le feu, c’est la pierre."

 

A lire : Equinoxes (Editions de La Bouteille à la mer, 1939), Zone franche (Collection Ressac, 1955), Azur de pierre (Subervie, 1962), La nuit ouverte (Subervie, 1967), Minéral (Rougerie, 1969), Les espaces noyés (Rougerie, 1971), Long Cours (Rougerie. 1972), Les portes défendues (Rougerie, 1975), Atterrages (Rougerie, 1977), Ombre du feu (Rougerie, 1979), Langue de terre (Rougerie, 1980), Le feu court (in « Paul Pugnaud », d’André Vinas, Subervie, 1982), Aride Lumière (Rougerie, 1983), Le jour Ressuscité (Rougerie, 1985),  Air pur (Rougerie, 1987), Posidonies (Rougerie, 1989), Epures (Editions du Mas Catherine, 1989), Ombres éclatées (Conflent, 1989), Instants sans passé (Rougerie, 1991), Aristide Maillol, essai (Conflent, 1992), Poèmes choisis (Rougerie, 1996), Ecouter le silence (Rougerie, 1999), Aux portes interdites (Rougerie, 2005).

 

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules



 
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