Poète, écrivain, dramaturge, essayiste, Stanislas Grochowiak (1934-1976), inconnu en France, est l’une des plus grandes voix de la poésie polonaise contemporaine. Sa vie fut, il est vrai, trop brève, entièrement consumée par la passion totale, par une révolte infinie, par l’alcool et ses démons aussi. Roman Sliwonik n’a pas écrit en vain : « Il avait un joli sourire, éclairant le visage. S’habillait affreusement… On voyait le poète par le prisme d’un bar, d’un café. Savions-nous, dans ces bars, que nous avions des âmes ? Nos poèmes répondaient oui, mais nos vies et façons d’être le niaient. » II y a le monde – et il y a Grochowiak le révolté. Le critique Jerzy Kwiatkowski analyse ainsi la vision du monde du poète (in revue Tworczosc, 1960) : « Sa révolte est celle de Prométhée. Sa conscience du tragique et des contradictions inhérentes aux lois de l’existence, qui l’obligent sans cesse à accuser le monde, n’en font pas pour autant un outsider méprisant. Il y a dans sa poésie la compréhension et l’amour pour l’homme tel qu’il apparaît dans toute sa répugnance biologique. » Et le Poète disparut. Que disait-il de lui-même ? « L’homme, doué de conscience, mais déterminé aussi par les lois biologiques implacables, est un être tragique, qui a pour choix : le mensonge à soi-même et un hédonisme plat, ou bien le pessimisme extrême, le désespoir des « viscères », ou encore l’héroïsme. À mon sens, l’héroïsme consiste à prendre pleinement conscience de toutes les défaites contenues dans le statut philosophique de l’homme et à leur faire face avec sa raison, son ironie et son rire… Où que j’aille, je ne piétine que moi-même ». Stanislas Grochowiak a été présenté pour la première fois en français (par Bojenna Orszulak) dans la rubrique « La Mémoire, la poésie » et publié dans Les HSE 28, 3ème série (2009).

Karel HADEK

(Revue Les Hommes sans Épaules).

Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules

Dossier : VICENTE HUIDOBRO ou la légende d'Altazor n° 28