Collection Les HSE
Deux corps pliés dans un jardin
Anne PESLIER
Poésie
ISBN : 9782243048285
62 pages -
13 x 20.5 cm
15 €
- Présentation
- Presse
Deux corps pliés dans un jardin, est une élégie, qui donne à lire une nouvelle voix ardente, blessée, douloureuse, sensuelle, d’amour et magnifique.
César BIRÈNE
*
Tes mains quittent les arbres
pour caresser les corbeaux
bien dressés sur le fil du jardin
dans ta poche quelques plumes noires
pour tenir la journée
tu vas lever dans une heure des filets à poissons
venus du lac
mais avant coupé sport dans lequel ô miroir tu
regardes ton premier cheveu
dans le reflet intérieur de ta folie
Et la nuit tombe pour t'étourdir
dans mes bras il est quatre heures
j’écoute
tes os prêts à se briser
rongés de l’intérieur par la rage
ta colère est pire que l'amour
et ton cœur il bat son plein
quand il jouit d’un vin
c’est le meilleur pour aimer
notre ivresse et toi plus ivre
on se risque dans les ténèbres
on dissèque la moindre parcelle
Anne PESLIER
(Poème extrait de Deux corps pliés dans un jardin, Collection Les Hommes sans Épaules, éd. Librairie-Galerie Racine, 2020).
Lectures critiques :
Il est parfois impossible de commenter un texte par crainte de le profaner. C’est le cas pour ce long et superbe poème, enlacement de deux êtres et de deux textes au-delà de la mort et au plus profond de la psyché.
Le titre de l’ouvrage essentiel de Leonardo Coimbra, La joie, la douleur et la grâce, titre qui fait procès, évoque parfaitement ce que nous rencontrons dans le chant et le cri d’Anne Peslier.
Un extrait est préférable à tout autre commentaire :
« Cette nuit-là je querelle mon corps
effacé devenu blanc et ton désir en plain visage
étonne ma peine d’être belle
comment pourrais-je te dire
que le désir abruti d’absence
fige le corps dans du marbre
C’est bien ton visage là et ton nom
tu me suis jusqu’à mes instants
je suis installée sur une pierre
telle une sentinelle ne voyant aucun ciel
l’intérieur sous la peau suffit à me diriger
mais l’heure est une épée et
notre chair saigne dans l’écorce de Mars
et ta forêt n’y peut rien tant d’heures
à dérouler ta face dans l’abrutissement de
la nuit
pour tenter d’effacer épuise nos sortilèges
comme un glacier dérive sans jamais
trépasser
Quand j’ai repris le fil de ma naissance j’ai rêvé
que tu m’avais diablement envoûtée
et que mon portrait avait échoué dans la vie pour cette seule raison
deviner ton corps alors
Je me brise parfois pour voir ton
visage jaillir d’une flaque au ciel
partout je suis née et morte sur les
murs où je passe en fille rageuse
nettoyée par plusieurs orages
inerte comme si la vie avait écrasé
ma peau, mais dans quelle mer
plonger pour être sûre de gagner
le naufrage
C’est bien après six mois d’agonie
que tu pleures ta dernière heure
il reste une année avant que l’eau se mêle à ton sang
comme la mer-océan se mêle
ton cœur parlait deux fois
et je n’écoutais que l’âme
pensant qu’un être-mort se noue facilement
à son amante et que cette prison ne s’achève jamais
car chaque parcelle est reconstituée à chaque
endroit du corps qui reste
Rémi BOYER (in incoherism.wordpress.com, mai 2021).