Collection Les HSE
Vintages
Rétrospective 1968-2007
Paul FARELLIER
Poésie
ISBN : 9782243043457
Livre épuisé
56 pages -
14 x 20.5 cm
- Présentation
- Presse
- Du même auteur
Voici une coupe longitudinale dans le tissu de quarante années d’une tentative poétique. Aucun souci d’accumulation, rien qui ressemble à des « œuvres (fatalement in)complètes », mais la brève incursion rétrospective : chaque année répond à l’appel en versant une seule goutte de son millésime. Vintages donc, par quoi le chai ose encore espérer. Quarante poèmes réunis : un seul par page et pour chacune des vendanges de 1968 à 2007. Les poèmes apparaissent ici privés de leur étiquetage d’origine – à savoir leurs titres, quand ils en avaient – et sans aucune référence immédiate aux recueils ou revues dans lesquels la plupart d’entre eux furent publiés. Une notice finale y pourvoit pour satisfaire l’éventuelle curiosité et remercier de leurs autorisations les éditeurs concernés.
1976
Au défaut même de leur cri,
des mots qui n’en finiraient pas
de taire et mériter leur sens :
un plus vaste discours, probable,
une ambition gardée lointaine...
Leur seul rythme, déjà, s’accorde
la parole amaigrie,
le geste qui l’épuise.
Toute énumération succombe
et le spectacle immense...
Un insecte
raye.
Paul FARELLIER
(Poème extrait de Vintages, Les Hommes sans Épaules éditions, 2008)
1993
Longtemps risqué,
parié
à tous les jeux d’ombres,
te voici échoir peut-être à ta lumière
– elle, timide, jusque-là dérobée,
accueillant enfin le soir
dans un pli secret du vent ;
elle, souriante amie
par-dessus l’épaule déchirée du temps...
Et tu montes le bûcher,
table de ta cendre,
tu clos ce lieu sans ailleurs
où, devant le pas sans nom,
ta joie seule
approche.
Paul FARELLIER
(Poème extrait de Vintages, Les Hommes sans Épaules éditions, 2008)
Deux approches critiques
Comme des meilleurs vins millésimés, Paul Farellier a sélectionné pour chaque année écoulée, et depuis 1968, une bouteille de son excellent cru poétique. Publiés ici où là, les textes qu’il nous offre dans cette rigoureuse anthologie sont choisis pour leur représentativité, leur qualité, le goût subtil de leur longévité et, quelque part, leur tendresse donnée au temps qui court.
Choisir un extrait de texte dans cette superbe sélection est dénaturer le message initial car la plupart des poèmes représentés ici le sont dans un contexte pourvoyeur d’instants privilégiés. Chaque âge a son destin, chaque vers son empire.
« cette sorte de voix mate et sans écho,
ce faible cri de lanterne,
une étoile sourde qu’on distingue à peine
au vent venu de la nuit. »
La démarche qui accompagne ce poème fascine, car c’est le regard même que Paul Farellier privilégie entre tous, opérant sur un choix qui importe déjà un choix supplémentaire où ne surnagent, en fin de compte que les seuls grands textes douloureux des « bonnes années », alors qu’il ne reste
« plus rien qu’un soleil ras
pour faucher les pluies glaçantes. »
Un petit livre tendre et pathétique.
Jean CHATARD, note (mars 2009) pour la revue Le Mensuel littéraire et poétique.
Paul Farellier est un poète du souffle et de la distance. Ces poèmes naissent du creusement, du travail, de soins et d’attente. Ils maturent dans la grande cuve à poèmes, nous offrant des millésimes qui selon le poète lui-même peuvent varier selon la terre, le soleil, les pluies, l’attention du vendangeur. Quarante poèmes pour quarante années, le choix du poète a dû être bien difficile. Un peu de hasard a pu s’inscrire dans ce choix mais certaines années sont d’une qualité rare et c’est sans attendre que nous devons déguster ces poèmes.
Des instants, des lumières, un regard sur un vécu, l’oiseau qui s’envole, le silence toujours en recherche dans l’œuvre de Paul Farellier, tout cela impose un moment poétique dense et questionnant. « J’écosse la mémoire » écrit le poète qui tente peut-être de ne pas laisser s’égarer le moindre tremblement dans ce que nous pourrions relier à un vers précédent : «Tout le métier d’aimer». C’est que le poème de Paul Farellier ne semble pas vouloir rester dans la solitude même si les apparences sont parfois trompeuses chez ce poète assez secret. Son espace poétique s’appuie sur la réflexion philosophique et métaphysique tout autant que sur les éléments du monde et de la nature accomplissant par son poème une symbiose qui nous conduit à vivre avec lui la matière du monde comme son néant. Ainsi par l’union du paysage et de la lumière comme connaissance d’une finitude acceptée, nous pouvons lire ces très beaux vers :
« il a gelé blanc
et la lumière est prise ».
Silence, beauté, lumière, des étoiles que Paul Farellier ne doit plus chercher. Elles nous semblent véritablement atteintes dans ce recueil.
Monique W. LABIDOIRE, in revue Poésie sur Seine, n° 68, printemps 2009.