Daniel PIERRE dit HUBERT

Daniel PIERRE dit HUBERT



Daniel PIERRE dit HUBERT, peintre né en 1963, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), à tôt senti, dès 1999, après avoir travaillé comme dessinateur publicitaire ou illustrateur indépendant, que la peinture n’était ni un jeu, ni un loisir ou une simple question d’esthétique. Chez lui, rien de gratuit. Chaque forme, élément ou couleur, possède sa signification, dût-elle relever de l’automatisme visionnaire, défini par André Breton comme étant : « La croyance à la réalité supérieure de certaines formes d’associations négligées, à la toute puissance du rêve, au jeu désintéressé de la pensée », ce qui tend à ruiner définitivement : « Tous les autres mécanismes psychiques et à se substituer à eux dans la résolution des principaux problèmes de la vie. » C’est d’ailleurs cet automatisme visionnaire, qui mène le peintre, tantôt vers l’abstrait, tantôt vers le figuratif néo-surréaliste. Quelle que soit l’abstraction apparente des œuvres, elles font très souvent allusion à un sujet. Le bleu est la couleur du peintre, de sa solitude comme de son désir d’évasion d’un monde de faux semblants et de prescriptions. Ainsi L’Amante Religieuse, outre son onirisme, est-elle dévorée par la solitude et l’orgueil. Les Hommes bleus, bien loin d’être des clowns ou des funambules, incarnent le désespoir contemporain de l’individu sur le fil du rasoir. L’Atome-Mate apparaît comme une ironique et monstrueuse machine à broyer l’être. L’art de PIERRE dit HUBERT consiste à amplifier la puissance du regard, pour lui permettre d’intervenir parmi les apparences. Le grand projet du peintre est sans doute celui de décrire l’angoisse contemporaine et individuelle, et de la surmonter. L’angoisse apparaît par des formes torturées et ondulantes, des couleurs sombres, des objets coupants et des silhouettes inquiétantes. Le malaise règne, accentué par la prolifération de formes amputées ou mutilées, tantôt coulantes et visqueuses, tantôt pétrifiées (on songe parfois à Dali). On ressent alors, comme devant une toile de Max Ernst, un étrange sentiment d’oppression. Ce dernier n’a-t-il pas affirmé : « L’élément donné par le hasard a toujours provoqué en moi l’irritation des facultés visionnaires. À ce qui était donné, il n’y avait plus qu’à ajouter ce qui se voyait en moi. Et j’assistais comme en spectateur à l’élaboration de la plupart de mes œuvres », propos également valables pour Daniel PIERRE dit HUBERT, qui a, aussi, recours à l’humour noir, à l’esprit de dérision. Le rire apparaît souvent derrière ses images de terreur. Un rire qui bafoue les conventions et les conformismes. Ainsi le peintre rajoute-t-il un détail saugrenu à un ensemble terrifiant (une fraise, une pomme, une carotte ou une poire, par exemple), un titre impertinent qui vient conjurer le sentiment de désespoir qui sort du tableau : Inquiétude saharienne ou Les Bidons vides, La Cerise sur le gâteau ou le dialogue de sourds, The Pear et le meilleur, Le triangle des Bermudes selon Saint Jean. Le tableau intitulé Les Wah, nous montre toute une tribu (préhistorique), qui traverse le néant pour rejoindre l’azur, car une vie meilleure l’attend. L’artiste tente d’apprendre et de nous apprendre, de fait, à dominer tout ce qui contrarie la vraie vie. Le regard du peintre est entièrement tourné vers l’intérieur, afin de mieux rejoindre, par la suite, l’extérieur. Allant du réel à l’irréel, comme de l’irréel au réel, le peintre peint ses visions, ses rêves, l’objet de son angoisse et son désir. À Honfleur (Calvados), où il a installé son atelier, en janvier 2003, Daniel PIERRE dit HUBERT met dans sa peinture toutes les ressources d’une sensibilité éprouvant jusqu’au vertige, ce que le monde extérieur a d’inquiétant.

Christophe DAUPHIN

(Revue Les Hommes sans Épaules).



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules




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