Le Pas de l'heure, précédé de Chemin de buées

Collection Peinture et parole


     zoom

Le Pas de l'heure, précédé de Chemin de buées

Monotypes de Béatrice Cazaubon
Paul FARELLIER

Poésie

ISBN : 9782912093820
75 pages - 13 x 20,5 cm
15 €


  • Présentation
  • Presse
  • Du même auteur

Poignante et en prise avec la vie, la poésie de Farellier – poète né en 1934, membre du comité de rédaction de la revue Les Hommes sans Épaules et membre de l’Académie Mallarmé - sonne pourtant comme une musique discrète évoquant l’émotion vive, décryptée, y compris dans ce qu’il peut y avoir à première vue de plus simple : sur la pointe des arbres doucement agitée par le demi-jour.

Ce qui est vu reste au plus près du vécu intérieur. Et le ton mezza voce du poème n’est rassurant qu’en apparence, car les mots connaissent le poids du sang. Chez Paul Farellier, la générosité côtoie l’angoisse, la mort, la solitude et l’émerveillement. L’interrogation est perpétuelle, l’image concise, le verbe ciselé au plus près du vrai et du vécu. Cette poésie épurée en dit long sur le fatum humain : Maintenant, – visage fixé : – un presque sourire – où se découd la naissance – avec le rien de personne, – apaisé peut-être d’un sens.

Pour l’ensemble de son œuvre, Paul Farellier a reçu en 2015 le Grand Prix de Poésie de la SGDL (Société des gens de lettres) couronnant son livre L’Entretien devant la nuit, Poèmes 1968-2013.

Vivre,

 

ce n’était plus qu’une saison,

l’épuisement d’une aile,

 

ce jardin de cendres :

à l’épais du feuillage

 

brûlant l’été,

le vert écobuage

 

du soleil enseveli.

 

*

 

Cette lumière

à gravir, l’œil serré sur la soif,

 

tel un silence de plus en plus aride,

efface le chemin.

 

Tout le dessin

s’épuise dans le blanc.

 

Une à une,

des lignes qui chevauchaient encore

 

s’anéantissent de poudre incertaine :

 

décombre de comète,

ces cailloux qu’un vent dévore vifs...

 

L’effort du marcheur

ne lui vaudra nulle conquête ;

 

une dette plutôt,

qui s’évertue à ne jamais s’éteindre

 

et se paye en siècles :

il n’aura gagné que d’être généreux.

 

Ici d’ailleurs, tout se refuse,

rien ne reçoit rien :

 

même la lumière est sans sépulture

 

Paul FARELLIER

(extraits de Le Pas de l’heure, Les Hommes sans Épaules, 2024).


Lectures :

C’est tout le jeu des polarités peu sereines de la vie qui est condensée dans la poésie de Paul Farellier. Un précipité d’incertitudes qui devrait nous angoisser et qui pourtant nous libère. L’épure du verbe de Paul Farellier est aussi épure de l’expérience humaine. Il rend ainsi l’essentiel accessible. Les mots, par « leur pointe aiguisée », retrouvent leur puissance.

 

Vivre n’a pas suffi

à te frayer le passage.

 

Et rien n’est visible encore

dans ta vitre embuée.

 

En travers de ta porte,

un dragon reste couché.

 

Au loin peut-être

                              et plus tard,

ton pas sur le sentier.

 

L’ouvrage, porté par les monotypes de Béatrice Cazaubon qui appellent à une méditation tranquille, sans objet et sans sujet, rassemble deux ensembles de poèmes, Chemin de buées puis Le pas de l’heure, un titre qui a lui seul évoque aussi bien la mort que l’éternité.

 

Quel dieu sans paupière

dans le regard des morts ?

 

Quel jamais dessillé ?

 

La main tremble, encore

d’avoir fermé ce bleu.

 

C’est l’intensité de l’instant présent, fusse-t-il un combat perdu d’avance, qui ouvre un intervalle enchanté, une porte lumineuse au cœur de l’obscur. Rien ne peut empêcher la beauté des mots de révéler l’innommable, le « vrai visage ». Nous sommes touchés par la lente irradiation des mots.

 

Quelle absence as-tu creusée

 

pour n’y trouver que la peur,

n’en exhumer que le cri ?

 

Va plus loin dans ton mur d’ombre,

 

franchis l’embrasure,

dépasse le rideau qu’entaillent les vents,

 

Reprends-leur la main de ta mémoire,

 

entends-la qui souffle sur le seuil

dans les mille voix de sa feuillure,

 

A deux battants de lumière

qui t’ouvre ses portes bleues

 

Dans l’œil et l’oubli futurs.

 

Pour l’ensemble de son œuvre, Paul Farellier a reçu en 2015 le Grand Prix de Poésie de la Société des gens de lettres couronnant son livre L’Entretien devant la nuit, Poèmes 1968-2013.

Rémi BOYER (in lettreducrocodile.over-blog.net, janvier 2025).

*