Dans la presse

 

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2008 – À propos du numéro 25

    « Si l’on connaît l’itinéraire poétique de Gérald Neveu, ici présenté par Christophe Dauphin, je découvre (dans les HSE n°25), Robert Champigny (1922-1984) disciple de Gaston Bachelard, mais dont les quelques poèmes lus dans le numéro sont une invitation à plus ample relation… Autre dossier par Michel Passelergue et Christophe Dauphin : Roger-Arnould Rivière, plus lyrique si j’ose ainsi écrire. Un beau numéro. »
    Jean-Michel Bongiraud (Pages Insulaires n°3, octobre 2008).

    « Christophe Dauphin n’est pas seulement surréaliste de l’avant-dernière heure, mais aussi (et faut-il penser « surtout » ?) fervent de la SF première de Rosny aîné, non pour sa Guerre du Feu mais pour le si mal connu Félin géant, où il a trouvé les « porteurs de feu » et les « Wah » de ses Hommes sans Épaules. Le numéro 25 parle de Gérald Neveu, rejeté partout et mort si jeune dans la misère, de Robert Champigny, dont la belle devise fut « Il ne faut pas laisser de traces », ce que pratiquement tous les poètes nient, trop sûrs d’eux. Enfin, au-delà des Wah, un dossier est consacré à Roger-Arnould Rivière par Michel Passelergue… On redemande de telles découvertes. »
    Paul Van Melle (Inédit Nouveau n°226, novembre 2008).




2016 - A propos du numéro 42 :

"Le dossier central de la livraison des HSE 42 (forte de plus de 320 pages) est consacré à Claude Pélieu, par Pierre Joris et Alain Brissiaud.

Claude Pélieu est né en 1934 en France. Trois ans en Algérie dans les Bat d’Af. Part en 1963, avec Mary Beach, aux Etats-Unis où il résidera, malgré quelques retours en France (en 1968 à Paris, et en 92-93 à Caen), jusqu’à sa mort en 2002. Une dague orageuse explose entre les sourcils du sexe. Il fut le seul représentant français de la beat generation, adepte du cut-up et auteur de nombreux collages la lune incandescente isocèle la conscience et hurle comme un moteur mal aimé. Une trentaine de pages de son œuvre, comprenant près de cinquante recueils, est donnée pour sonder sa poésie si particulière et cette définition : Ecrire la poésie, c’est plonger dans l’inconnu, et marcher, marcher, pour oublier les crimes crapuleux des mots et la mémoire mouvante. Des poèmes de Jack Kerouac, Julian Beck, Allen Ginsberg, Carl Solomon, Ed Sanders, Pierre Joris et Bruno Sourdin suivent « autour de Claude Pélieu ». Avant un ensemble consacré à Allen Ginsberg, avec un texte écrit par Pélieu pour son soixantième anniversaire La poésie de Ginsberg est toujours hors-champ, en marge, dehors et une étude de Christophe Dauphin sur « le poète-Amérique ». L’auteur de Howl se joindra dans les années soixante au mouvement hippie et deviendra un symbole de l’opposition à la guerre du Vietnam. Le chef de file de la beat generation restera avant tout comme un grand mystique. Il disparaît à l’âge de 70 ans. D’autres auteurs du même mouvement sont également présentés dans ce n° comme Lawrence Ferlinghetti, Gregory Corso, le célèbre auteur de « Bomb », Bob Kaufman et aussi Vim Karénine…

Mis à part ça, Christophe Dauphin donne un édito très engagé sur la religion, où il s’appuie sur des prises de position de Talisma Nasreen et Adonis. A la suite de quoi, il rend un chaleureux hommage à Yves Bonnefoy sous l’angle de sa perception du surréalisme et cette citation : Yves Bonnefoy retient que la poésie n’est pas un discours orné […] mais qu’elle est comme une langue étrangère à l’intérieur de la langue, et par laquelle l’individu fait une expérience particulière, une mise à l’épreuve de soi-même…

Mis à part ça, deux poètes sont mis en avant dans cette livraison : l’Allemand Hans Magnus Enzensberger (né en 1929 en Bavière): à Jerez on échange des baisers pour deux fois cinq dents Avec une poésie engagée et questionnante tendez vos pommes d’Adam à mes morsures de Judas et des textes drus et longs et captivants Ne manquez pas d’acheter des cercueils climatisés avec chasse d’eau. Et le poète hollandais Cees Nooteboom (né en 1933 à La Haye) qui manqua de devenir moine avant de parcourir le monde, du Surinam au Japon: Je suis, telle une flèche, / tendu vers le lointain / mais dans le lointain / je ne suis / rien.

Mis à part ça, une étude brillante de l’œuvre de Colette Klein par Gérard Cléry qui éclaire son parcours recueil après recueil. J’allais éclore / mais le feu a repeint la vie / et ses doigts de dentelle / m’ont écrasé / sans bruit… Elle n’apprend qu’à trente ans qu’elle est juive. Elle sera la compagne de Pierre Esperbé et travailla avec lui autour de la revue Phréatique. La peur a mis son corsage d’oiseaux / comme si la nuit / devait en mourir.Tous ses récents recueils sont édités chez Alain-Lucien Benoît.

Mis à part ça, une promenade avec Roger Vailland l’infréquentable par Jehan Van Langhenhoven. Des textes aussi de Jacqueline Lalande, Yves Boutroue : le sang las / dans le fracas des veines, Frédéric Tison… et Samaël Steiner.

Mis à part ça, un dossier consacré à l’incroyable auteur de happenings Pierre Pinoncelli. Avec un entretien de Virgile Novarina qui prépare un film sur lui par Marie-Françoise Dubromel. Pierre Pinoncelli, né en 1929 termine son préambule de présentation ainsi : s’efforcer d’être GROTESQUE pour empêcher la vie de se coaguler dans le sérieux, le bon goût, et l’esthétisme. Il dit par ailleurs : Le happening, pour moi, c’est l’immaturité volontaire, c’est la fidélité à l’enfance… C’est une rallonge mise à la jeunesse. Je cite quelques exemples retentissants de ses actions : un hold-up à la SG de Nice (jumelée avec le ville du Cap en 75 lors de l’apartheid), l’aspersion d’André Malraux à la peinture rouge lors de l’inauguration du musée Chagall à Nice en 1969, entre autres… et bien sûr, les trois attentats contre l’urinoir de Duchamp, une fois en urinant dedans (Ready-made réciproque), et deux fois en le cassant avec un marteau. Enfin en 2002, il se mutile un petit doigt pour protester contre les Farc en Colombie… Incroyable personnage !

Mis à part ça… le numéro est tellement plein comme un œuf et riche à la lecture qu’il mérite largement d’être la revue du mois !!! »

Jacques MORIN (cf. La revue du mois in dechargelarevue.com, 5 novembre 2016).

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" Voici un numéro très Beat puisqu’une bonne partie de cette nouvelle livraison des HSE célèbre les poètes de la Beat Generation : Claude Pélieu, Gregory Corso, Bob Kaufman, Lawrence Ferlinghetti, Allen Ginsberg… L’hommage commence avec l’éditorial de Christophe Dauphin : « Hier comme aujourd’hui, le monde a besoin de gens comme les beats, révoltés éblouis et pacifiques, clochards célestes, poètes hallucinés, étrangers au formatage généralisé de la société cybernétique. Davantage qu’une pratique d’un mode d’écriture ou d’un langage novateur, la Beat generation est un mode de vie contestataire, une révolte qui en appelle à la recherche d’autres espaces mentaux et géographiques, d’autres expériences où s’effaceraient les frontières (entre les gens comme entre les arts), la misère initiale, l’image d’une Amérique repliée sur elle-même. Les artistes de la Beat generation aspirent à devenir selon la formule d’Allen Ginsberg : « des vagabonds de la nuit, intelligents et melvilléens ». (…)La mystique poétique et lunaire des beats est bien loin de la religion telle qu’elle pollue encore et toujours notre atmosphère. Les poètes ont leur mot à dire sur le sujet. Pourquoi ? Parce que « le poète est celui qui transgresse pour notre compte la règle de l’accoutumance », nous dit Saint-John Perse. »

Le dossier Beat se révèle très actuel des deux côtés de l’Atlantique, entre la tentation populiste des USA et le faux débat laïcité/religion de la France. Christophe Dauphin en appelle à Abdellatif Laâbi pour redire ce qu’est ou devrait être la laïcité, contre tous les obscurantismes, y compris athées.

Le dossier, établi par Pierre Joris et Alain Brissiaud est consacré à Claude Pélieu, l’un des maîtres du cut-up, mais pas seulement, pour nous offrir une œuvre forte et réellement originale, toujours à découvrir. Le dossier, sans faire le tour d’un personnage complexe et nécessairement insaisissable, livre plusieurs facettes talentueuses de l’homme et de sa création, souvent dévastatrice.


Soupe de lézard


Odeur de bois vert.

Je rêve dans les prés bleutés de mon enfance.

 

Odeur de bois vert.

Les prés bleus de mon enfance.

Photos fanées d’une merveilleuse banalité

Salade de fruits, biscuits, piquette, violettes, boutons d’or. Derrière ces murs les haillons pourris de la « creative writing », les cerveaux morts des profs secoués de tics – plaques d’égouts fumantes – tout sombre dans les sargasses de crème fouettée. D’un côté poésie, de l’autre rien, moins que rien.

Les empires sur lesquels le soleil ne se couchait jamais. Je rêve. Temps doux. Début d’hiver sans neige. Le parfum des fougères toujours tenace.

Eventails de couleur disparaissant derrière les trembles & les peupliers.

La rivière ne fait guère de bruit, gardienne de tous les secrets.

Nuages orchestrant cette féerie.

Vrai, nous sommes du chromo, de la croûte.

L’herbe bleue recouvre tout ce qui germe.

Abeilles. Alouettes dans les blés d’automne.

La chasse est ouverte. Echos tristes au fond des canyons & des gorges touffues, silence dans la Sierra, le monde a un goût de cendre.

Tout est vendu. Invisibles dangers. Nuages plaqués contre le ciel pierreux. On dirait une peinture de Magritte.

Fantômes tombés du firmament.

Le sablier de l’éternité tout de leurs spectacles. 

 

Ce numéro, au sommaire remarquablement riche, introduit le lecteur à la Beat generation en évitant les nostalgies rêveuses et tardives, en quête d’une tension créatrice libérée des contractions de la médiocratie."

Rémy BOYER (in incoherism.wordpress.com, 29 septembre 2016)

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" Cette revue nous a habitués à de copieuses livraisons semestrielles et celle-ci ne déroge pas à la règle que se sont fixés Christophe Dauphin et son équipe rédactionnelle. Ici, dès l’éditorial, les prises de position sont clairement affirmées dans la lignée d’un humanisme à la fois tolérant et intransigeant. Si par exemple l’on rend un hommage mérité à Yves Bonnefoy, c’est pour en circonscrire l’œuvre féconde et non pour ajouter une voix louangeuse supplémentaire au concert posthume.

On lira tout d’abord les textes percutants des « porteurs de feu » que sont l’Allemand Hans Magnus Enzensberger et le Hollandais Cees Nooteboom qui n’usurpent pas ce titre.

Claude Pélieu a droit à un dossier-hommage présenté par deux spécialistes de la beat génération, avec, encadrant le dossier, les écrits de 14 poètes très divers ; cela va des Américains Gregory Corso, Bob Kaufman et Lawrence Ferlinghetti aux Français Gérard Cléry, Vim Karénine et Frédéric Tison sans oublier Odile Cohen-Abbas, Jacqueline Lalande et Martine Callu.

On lira encore un long entretien avec Virgile Novarina qui permet de redécouvrir l’itinéraire artistique du provocateur Pierre Pinoncelli ainsi que d’autres volets qu’il serait trop long de présenter. Pages libres et notes de lecture complètent ce numéro d’une grande qualité littéraire et surtout d’une parfaite cohérence dans les choix éditoriaux. "

Georges CATHALO (cf. "Lecture flash", in revue-texture.fr, octobre 2016).

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" Recevoir la revue Les HSE est toujours la promesse jamais démentie de découvrir des  lectures variées et consistantes. Cette fois encore, avec sonnuméro 42, la revue semestrielle tient ses promesses (et sa fonction  de revue). Il me sera difficile de faire ici le tour de son sommaire foisonnant.

J’ai particulièrement apprécié, sans réserve, le long éditorial de Christophe Dauphin, préambule d’un texte inédit à paraître. Une parole claire et lucide, sans les lâches circonvolutions d’usage, sans démagogie ni  oeillères, où il aborde la question des religions qui occupe l’espace public, « pollue encore et toujours notre atmosphère », quand celles-ci se prennent pour des sciences exactes. Empruntant le titre de son édito à Artaud, il rappelle le bien-fondé de la laïcité, s’appuyant sur les écrivains et penseurs les plus pertinents (et les plus exposés à la vindicte ambiante du moment et à l’ignorance de nos soi-disant élites intellectuelles et politiques) : Gérard Biard (qui se demande si on a le droit aujourd’hui de ne pas croire en Dieu), Taslima Nasreen condamnée à mort par les islamistes, les poètes Abdellatif Laâbi, Adonis et Saadi Youssef.

Le dossier principal, très exhaustif,  fait retour sur la Beat Generation avec une partie consacrée à  Claude Pélieu, deux études sur Allen Ginsberg et un choix de  poèmes de Lawrence Ferlinghetti, Gregory Corso, Bob Kaufman, poètes parmi les moins connus de la Beat Generation.

Dans les autres pages, un hommage à Yves Bonnefoy par Christophe Dauphin, un dossier éclairé sur Colette Klein par Gérard Cléry, de nombreux poèmes dont ceux de Serge NúñezTolin, Gérard Cléry et Alain Brissiaud. "

Marie-Josée CHRISTIEN (in Spered Gouez n°22, novembre 2016).

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"Avec Les Hommes sans Epaules n°42, qui contient des hommages à des talents récemment disparus, la poésie redevient encyclopédique et ouverte aussi bien au cher surréalisme de Christophe Dauphin, qu'a bien d'autres poètes.

Je saute des uns à d'autres, comme si c'était fait intentionnellement, alors que je sais depuis longtemps, que comme chez nous, le hasard contribue plus que les choix, à toutes les découvertes possibles. Comme toutes les poésies et tous les arts, admirés ou méprisés, sinon haïs parfois, alors que de génération en génération, si peu d'ordre demeure intact et tant de bons disparaissent de nos mémoires et tant de faiblards d'une époque passée, reviennent aux avant-plans, après un souvent très long oubli.

Dans la même revue, datée du second semestre 2016, l'éditorial ressemble à une grande et nouvelle Histoire des univers littéraires, que l'on soit jeune lecteur ou poète, que l'on revienne à des langues tristement abandonnées, à de beaux jeux anciens ou que l'on découvre du neuf. J'ai compris le plaisir d'accepter toutes les natures poétiques, toutes les langues heureuses et même, plus rarement cependant, les simples mais bonnes volontés. Ce qui m'a surpris, c'est qu'il ne s'agit que du début d'un texte plus long, mais aussi que les sujets (car il y en a plusieurs, surtout contradictoires) concernent (ou plutôt ne concernent pas) sous un long titre pas très facile à interprêter: "Le Poète n'admet pas que l'on fonde une religion sur ses vertèbres ou son cerveau"; comme s'il était question des deux mots qui apparaissent le plus souvent, religion et laïcité, pour réfléchir et citer des personnages qui ne pensent qu'à cela. Par exemple, le sage Abdellatif Laâbi (que j'ai publié déjà il y a longtemps), Claude Pélieu, les plus classiques Allen Ginsberg, Adonis, Lawrence Ferlinghetti, que je ne connaissais pas, et surtout Taslima Nasreen, dont il est question en fait, dans toute la suite du texte et qui fait comprendre l'inidspensable laïcité que Dauphin expliquera plus avant dans la suite, passant alors de l'antisémitisme à l'islamophobie et à des tas d'autres notions expliquées clairement et auxquelles il sera utile de revenir.

Pour moi, trois mots suffisent: religion(s), réligiosité et irreligion. Ils me semblent remplacer tous les autres, que je ne vois que comme des sortes de synonymes où demeure la racine initiale, due aux sources simplement anthropologiques des premiers vivants presque devenus humains. Un drame dans le même numéro est la présence de trop nombreux disparus, dont la célébritée passée me fait penser à mes lectures déjà anciennes ou récentes si ce sont de plus jeunes. Je ne parviens que difficilement à dater tous ces morts, dont il faut et surtout faudra se souvenir parce que l'histoire littéraire et artistique supporte mal les dates.

Il est évident pour moi et pour la revue Les HSE, que la vérité est dans les textes, et l'imposante revue de Christophe Dauphin, est tellement nourrie de différences, que les quelques réputations qu'on lui a faites me semblent bien plus encyclopédiques qu'anthologiques aux sens anciens du terme, mais selon moi, plus encore d'Histoire que de littérature(s), tant le lecteur se sent construit, sinon reconstruit, par l'univers du revuiste."

Paul VAN MELLE (cf. "A tous mes échos" in Inédit-Nouveau n°281, La Hulpe, Belgique, octobre 2016).




Lectures critiques :

Les Hommes sans Épaules, numéro 57 : Poètes bretons pour une baie tellurique : « C’est un très vaste paysage de la poésie bretonne que nous dresse ce numéro de la revue Les HSE : 33 poètes auxquels on peut ajouter sans erreur des poètes présentés dans les rubriques « Porteurs de feu » ou « Ainsi étaient les Wah » inséparables de ce coin de terre, comme Perros, Delabarre et Kenneth White, ou encore Guy Allix, Emmanuel Baugue (quoiqu’un peu Normand), ou André Prodhomme (quoique d’un peu partout). Pour chacun, nous avons droit à une présentation du poète et de son œuvre, marque de fabrique inégalée de cette revue.

Rappelons à cette occasion qu’il n’existe pas d’autres revues (en ligne ou pas) ayant une connaissance aussi intime, si j’ose, d’un si grand nombre de poètes, en particulier ceux nés entre les années 1920 et 1950. Par exemple dans ce numéro, les présentations de Guillevic, Manoll, Robin, Grall, Glemnor, Cadou – pour ne citer qu’eux – méritent d’être lues pour elles-mêmes. Cela rappelé, penchons-nous sur le dossier « Poètes bretons pour une baie tellurique ». Il y a une évidente volonté d’équilibre entre poètes connus, méconnus ou inconnus tout comme entre des poètes du début, du milieu ou de la deuxième moitié du XXe siècle. Évidemment, on lui reprochera — moi le premier ! —  tel ou tel auteur absent (pourquoi ne pas avoir retenu Gilles Baudry ? Charles Le Quintrec, qui pourtant publia son Village allumé chez Saint Germain des Prés ?) Mais je concède que le paysage est déjà considérable et qu’il est bon qu’il y ait quelques « injustices » pour ranimer la levée de bocks ou de ballons pris en commun.

Que ressort-il du paysage dressé ? On retrouve une très bonne illustration des grands courants poétiques bretons du siècle écoulé avec la mise en avant des très singulières années 70 et 80, qu’on peut résumer au conflit qui opposa la génération de Jack-Helliaz à celle de Grall, le premier avec son cheval d’orgueil et le second avec son cheval couché. On retient également cette tresse, que je crois propre à la Bretagne, qui rassemble une poésie ancrée, privilégiant plutôt une forme de dépouillement, une poésie « bardique », volontiers vindicative et pamphlétaire (voire guerrière), et qui aime à être mis en musique, et une poésie druidique attirée par le merveilleux et l’alchimique qui plonge volontiers dans la veine surréaliste (ce qu’affectionne particulièrement notre revue). L’élément qui réunit ces trois courants, hormis la Bretagne elle-même, c’est la place incontournable du minéral (le granit, le mica, etc.), pour ne pas dire le tellurique comme le pointe si justement le titre du dossier.

M’a frappé également, à la lecture du dossier, la relative étanchéité qui règne entre la poésie de l’Argoat et celle de l’Armor. Il semble bien qu’en Bretagne deux univers poétiques distincts se côtoient sans se confondre, ainsi que les paysages et les modes de vie. Enfin, et bien sûr ajouterai-je, le dossier permet de mesurer la solide et féconde richesse du terrain éditorial breton grâce au dévouement de quelques maisons d’éditions (pas forcément bretonnes), d’associations culturelles et artistiques très actives (comment ne pas citer « les rencontres de Max ») et de quelques figures tutélaires qui ont su jouer un rôle de découvreur ou de rassembleur (Grall, Guillevic, Brémont, Christien et Geneste aujourd’hui). Pour conclure, et picoter d’iode l’ami Christophe Dauphin, après avoir lu son passionnant édito, je me suis demandé si ce n’était pas un article pro domo pour la poésie… normande. »

Pierrick de CHERMONT (in recoursaupoeme.fr, 6 novembre 2024).

 

*

 

« Il est généralement éclairant de découvrir notre paysage poétique breton par le regard d’un observateur avisé. Il est également rassurant de constater que nos poètes continuent de susciter intérêt et curiosité, malgré la quasi-disparition des revues en Bretagne. C’est en voisin normand et poète de l’Ouest que Christophe Dauphin aborde les « poètes en Bretagne » dans un copieux numéro de la revue qu’il aime depuis 1997, Les Hommes sans Épaules.

34 poètes sont présentés de façon développée, accompagné d’un choix de textes conséquent. Pierre-Jakez Hélias, Anjela Duval, Glenmor et Xavier Grall y côtoient Gérard Le Gouic et Guénane. En dépit de leur diversité, Christophe Dauphin leur reconnait des points communs qui traversent les générations : la connivence avec les paysages tourmentés de la péninsule armoricaine, un riche imaginaire ouvert sur le monde, « un goût frondeur pour l’indépendance ».

Christophe Dauphin rappelle à bon escient l’attraction régulière de « la matière Bretagne » pour bon nombre de poètes qui n’en sont pas originaires, dont Saint-Pol-Roux, Georges Perros, Kenneth White, Samuel Bréjar et plus récemment Henri Droguet, Gérard Cléry, Colette Wittorski, Joseph Ponthus, Guy Allix, André Prodhomme et Emmanuel Baugue. La Bretagne fut aussi pour Paul Celan, de 1954 à 1961, une terre d’accueil qui lui inspira une série de poèmes dont des extraits sont reproduits dans ce dossier.

Christophe Dauphin met en lumière bon nombre de poètes qui ne figurent habituellement pas dans les ouvrages de références sur la Bretagne : Louis Guillaume, Armand Robin, Norbert Lelubre, Odile Caradec, Jacques Bertin, Danielle Collobert, Alain Morin, Alain Simon, Mérédith Le Dez et Gwen Garnier-Duguy. Il mentionne aussi plusieurs poètes bretons qui furent proches du mouvement surréaliste : Jacques Vaché, Angèle Vannier, Yves Eléouet, Hervé Delabarre. »

Marie-Josée CHRISTIEN (in revue Spered Gouez n°30, 2024).

 

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La revue Les Hommes sans Épaules consacre son numéro 57 aux « Poètes en Bretagne » et rend hommage à Frédéric Tison, récemment disparu.

L’identité bretonne, préservée malgré les aléas, a permis aussi une poésie bretonne née tant de la géographie que du peuple. Plutôt que de particularismes, Christophe Dauphin, avec Glenmor, préfère parler de caractéristiques des poètes de l’Ouest : « Les habitants de ces contrées semblent avoir toujours été la proie de tentations contradictoires : l’une les presse de confier leur destin à la mer, de lâcher tout pour courir la chance de découvrir d’autres cieux, d’autres terres ; l’autre leur dépeint vivement la douceur du foyer, dans la maison tapie au bout du chemin creux, les avantages d’une existence passée dans la sécurité, que garantissent les traditions et le retour périodique des saisons. De ces contradictions, les meilleurs de ceux dont elles marquèrent le caractère ont toujours su tirer une source d’énergie. »

Louis Bertholom, de Fouesnant, précise : « Je ne sais pas si la Bretagne est une terre de poésie plus qu’ailleurs. Il existe tout de même une sensibilité spécifique des gens de Bretagne qui confère une âme à cette région, proche d’une certaine forme de mélancolie dans le sens artistique du terme. Nous avons tout un légendaire arthurien, une Brocéliande dans nos gènes qui nous poursuit malgré tout. Puis le Barzaz Breiz, les gweerzioù et autre patrimoine chanté, transmis de générations en générations qui alimentent insidieusement notre façon d’être au monde. La poésie celtique est spécifique à son territoire, avec ses connotations celtiques même s’il y a des exceptions. »

C’est la poésie elle-même qui dit le plus sur la Bretagne, ses langues et son peuple. C’est pourquoi ce numéro 57, qui rassemble un grand nombre de poètes, porte une part de l’âme bretonne au lecteur.

Rémi BOYER (in /lettreducrocodile.over-blog.net, 24 mai 2024)

 

Extrait de « Bretagne est univers » de Saint-Pol-Roux :

 

« Il ne lui suffit point de distribuer l’oracle

Et d’accroître le globe au jeu de ses timons,

Elle insère l’esprit de son propre miracle

A même la matière des bois et des monts.

Voici le coffre aux joies, le clocher, le calvaire

Et l’auguste fontaine au lipide présent.

Après, l’enchantement créé par le trouvère

Et le prince des mers, celui de l’artisan. »

 

 

Extrait de "L’enfant du druide "de Angèle Vannier :

L’enfant du druide ouvrit les vannes du silence

Un chant se répandit longtemps

L’eau le sang le feu

Les trois dans la forêt

Pour bâtir un palais d’automne

 

Un grand secret faisait la roue sur le parvis

D’un clair-obscur jaillit la fleur miraculeuse

Le double de la pierre philosophale.

L’enfant faisait la chasse à la folie

Il délivrait des plages de cristal

Sous un vieux chêne inconsolable.

 

 

La clé de la clé disait mon compagnon

Cet enfant la chantait »

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2008 – À propos du numéro 26

    « Ce numéro 26 des HSE s’ouvre sur un manifeste dû à Abdellatif Laâbi : Ici La voix des Arabes libres… Le ton de ce texte militant est donné. Plus loin, quelques poèmes d’A. Laâbi confirment cet engagement qui replace, s’il en était besoin, le poète au cœur du monde vivant et à vif. Suivent, entre autres, des hommages et évocations (Jacquette Reboul, Louis Guillaume, Mahmoud Darwich et Jacques Taurand) ; un dense dossier consacré à Jacques Bertin par le maître des lieux, Christophe Dauphin ; des textes des « Wah », ceux qui furent proches de la revue créée en 1953 ; des textes des collaborateurs actuels, des notes dues à divers regards. Les HSE est une grande revue de littérature comme il en est peu, sachant balancer entre passé, présent et futur. »
    Jacques Fournier (Ici è là n°10/11, mars 2009).

    « Emanant d’un groupe autour d’une librairie, Les Hommes sans Épaules maintient son cap, en bonne part grâce à la passion de Christophe Dauphin. J’ai toujours aimé ces références aux frères Rosny pour titrer les rubriques : les Wah, les Porteurs de feu et bien sûr les Hommes sans épaules. Je reviens à la revue pour son numéro 26, avec le manifeste d’Abdellatif Laâbi : « la voix des arabes libres », et l’étude de Dauphin sur le poète marocain. Je ne connaissais pas Jacquette Reboul qui comme la plupart des autres est de ces fidèles des éditeurs Chambelland, Alain Breton, Le Pont de l’Epée, Le Pont sous l’Eau et la Librairie-Galerie Racine entre autres. Et c’est une découverte, car ses proses poétiques ou récits-poèmes sont pur plaisir. Comme les poèmes de Jean Chatard, Jean Vigna, Paul Mari. Puis le dossier, consacré à Jacques Bertin, qui chante aussi bien qu’il écrit paraît-il. »
    Paul Van Melle (Inédit Nouveau n°232, mai 2009).

        « Le plus important article de ce numéro 26 des HSE est un excellent « dossier » consacré par Christophe Dauphin à Jacques Bertin, « le poète du chant permanent », qui débuta en 1966, on n’ose pas dire comme « auteur-compositeur-interprète », suivant la formule traditionnelle – mais plutôt comme un poète chantant ses œuvres. La trentaine de poèmes qui illustre cette étude montre bien la qualité littéraire de ses textes, même sans le support de la musique. »
Jacques Charpentreau (Le Coin de table n°39, juillet 2009).

    « C’est Abdellatif Laâbi qui dans « la voix des arabes libres » donne le ton à la revue de Christophe Dauphin : « Nous nous insurgeons contre cette aphasie programmée dont le dessein, cousu de fil blanc, est le conditionnement des consciences avant leur mise à mort ». Après la présentation de Jacquette Reboul (par Paul Farellier) et Abdellatif Laâbi (par Christophe Dauphin) arrive le dossier sur Jacques Bertin, chanteur et poète –sur plus de 50 pages – qui nous confie : « J’ai 60 ans et j’ai besoin de croire en la vie, l’amour, la révolte, l’harmonie, l’Homme, la société. »  Contre le show-business, contre les outils de la massification des comportements, Jacques Bertin symbolise l’homme toujours debout, sans concession. Outre ce dossier important sur Jacques Bertin, Christophe Dauphin s’est intéressé à Jacques Taurand, poète intimiste, héritier de Nerval et auteur de 11 recueils… Si Paul Farellier rappelle l’œuvre de Louis Guillaume, Monique W. Labidoire traite de l’identité sans nom dans l’œuvre de Jacqueline Brégeault-Tariel… Ce numéro très riche des Hommes sans Épaules se dresse contre le consensus mou et remet la dignité de l’homme au cœur du débat. »
    Gérard Paris (Diérèse n°45, août 2009).




2017 - A propos du numéro 43 :

" La dernière livraison des Hommes sans Epaules, comme les précédentes, comporte de nombreuses études, des poèmes, des notes de lecture. L’éditorial, signé par Yves Bonnefoy, récemment disparu, intitulé La poésie n’est pas un dire mais un déblaiement, une instauration, définit avec force le but, les pouvoirs de la poésie : « Continuer d’espérer, vaille que vaille. Continuer de penser que l’arbre et le chemin sont si beaux dans la lumière du soir que ce ne peut être pour rien, et que nous avons toujours la tâche de les montrer, dans leur évidence. » Belle profession de foi de la part d’un de nos plus grands défenseurs de la poésie, d’un de nos meilleurs poètes.

La rubrique Les porteurs de feu est consacrée à Ounsi El Hage, poète arabe, présenté par Christophe Dauphin et tandis que Paul Farellier rend hommage à Jean-Paul Hameury, poète, essayiste, nouvelliste, décédé en 2009.

Dans les rubriques suivantes on peut lire, entre autres poèmes, ceux de Jean Pérol, d’Olga Vassileva, de Joachim Arthuys, de Louis Peccoud.

Paul Farellier consacre une étude, Le poème pour condition, qui est proche d’un essai, à l’un de nos poètes les plus représentatifs de sa génération : Lionel Ray. Cette étude chronologique permet de suivre l’itinéraire de Lionel Ray dès « Partout ici même » ( Gallimard, 1978 ) qui est « un livre inaugural » et Paul Farellier d’étudier la structure de cette écriture, la thématique en germe dans ce livre. Poète lyrique, Lionel Ray est hanté par l’absence, dans « Matière de nuit » ( Gallimard, 2004 ), par exemple, par le temps, dont la présence s’affirme dans « Syllabe de sable » (Gallimard, 1996 ), sans oublier la présence de l’amour, ce que Paul Farellier nomme les « iles amoureuses » ni celle qui lui fait écho : la mort, dans « Le Nom perdu » (Gallimard,1987 ). Cette étude d’une grande densité permet de mettre en lumière les différents aspects de la poésie de Lionel Ray, de le suivre dans son cheminement poétique qui est celui d’un homme en quête de vérité et de lucidité.

Dans la rubrique Une voix, une œuvre, Christophe Dauphin présente Taslima Nasreen, poète bengali dont la tête fut mise à prix dans son pays en raison de ses écrits, de son soutien apporté aux victimes de Charlie Hebdo. On peut lire quelques poèmes de cette femme militante dont l’œuvre comprend poèmes, romans, récits publiés en France chez différents éditeurs.

Il faut aussi mentionner, outre les nombreuses notes de lecture des Portraits éclairs, ceux de Christophe Dauphin et de Réginald Gaillard par Pierrick de Chermont et de Jean-Louis Bernard par Michel Passelergue. Pour terminer cette livraison propose de nombreux textes et poèmes de plusieurs auteurs dont Frédéric Tison, Paul Eluard, Michel Butor, Gérard Cléry, Nanos Valaoritis et bien d’autres.

Les Hommes sans Epaules constituent une source créatrice et poétique dont on ne saurait négliger l’importance et la diversité des propos, la qualité des différentes rubriques et celle des textes choisis."  

Max ALHAU (cf. "Chemins de lectures" in revue-texture.fr, mars 2017).

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" Ce quarante-troisième Cahier Littéraire des HSE est consacré à Lionel Ray. Le dossier établi par Paul Farellier est accompagné de poèmes inédits. C’est au début des années 70 que Lionel Ray abandonne le nom de Robert Lohro pour marquer une rupture dans son cheminement et son œuvre poétiques. C’est une période de dissidence, de déconstruction, « celle aussi, nous dit Paul Farellier, d’un totalitarisme linguistique où le poème aura bientôt peine à trouver sa respiration. Mais, trop vrai poète, l’homme auquel nous avons affaire pouvait-il se démettre longtemps de sa liberté ? »

Cette première rupture en annonce une autre, dix ans plus tard, une « métamorphose » qu’il décrira lui-même :

« Alors j’ai décidé, faisant table rase de mes fausses terreurs comme de tout terrorisme linguistico-théorique, de saisir la coïncidence la plus exacte possible entre écrire et vivre, et comme l’un de l’autre se fortifie, d’interroger cette rencontre de l’événement, du regard et du poème. »

Remarquons que cette métanoïa créatrice échappe ici à toute posture.

« Le poème, chez Lionel Ray, nous dit encore Paul Farellier, n’est jamais le déversoir d’une plénitude ; il vient en contrepoint d’un manque, comme la marque d’un dénuement qui obligerait le poète à se jeter dans l’espace verbal. »

Des ruptures au sein de l’apparaître émane toutefois une permanence qui fait du temps une matière à travailler par le langage autant que le temps pétrit la langue.

Dans l’éditorial d’Yves Bonnefoy, disparu le 1erjuillet 2016, éditorial intitulé La poésie n’est pas un dire, mais un déblaiement, une instauration, nous lisons ceci :

« La poésie ? Ce n’est pas ajouter des livres à d’autres, sur des rayons de bibliothèque, pour faire avec eux une littérature, et son histoire, et de la culture, autrement dit de la mort, non, c’est tenter de rendre aux mots la pleine mémoire de ce qu’ils nomment : ces choses simples qui sont de l’infini, de la vie, quand on les perçoit dans leur immédiateté, mais que notre discours conceptualisé, tout analytique, remplace par ses schèmes, ses abstractions. (…)

D’où l’intérêt qu’il y a, pour qui se soucie de la poésie, à écouter les questions qui lui sont posées, c’est une occasion de prendre conscience de ce qui, dans sa réflexion ou même au plus intime de son existence de chaque jour, veut lui faire oublier ce devoir de lucidité, c’est-à-dire abandonner sa grande espérance. »

Rémy BOYER (in incoherism.wordpress.com, avril 2017).

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"Les Hommes sans Epaules nous livrent leur 43ème cahier littéraire, un volume, lui aussi, copieux, avec quelques trois cents pages et quelques plats de résistance(s). Ainsi l'éditorial, La poésie n'est pas un dire, mais un déblaiement, une instauration, est-il signé par Yves Bonnefoy, disparu le 1er juillet 2016. Il s'agit en fait d'extraits d'entretiens et de correspondances avec le poète. Je citerai en vrac quelques fragments qui nous aident, j'en suis convaincu, à vivre le mieux et le plus justement possible, non pas en poète, mais en poésie : La poésie ? Ce n'est pas ajouter des livres à d'autres... c’est tenter de rendre aux mots la pleine mémoire de ce qu’ils nomment : ces choses simples qui sont de l’infini, de la vie, quand on les perçoit dans leur immédiateté, mais que notre discours conceptualisé, tout analytique, remplace par ses schèmes, ses abstractions.... La poésie tend à déconstruire les mythes qui l'entravent.

Au sommaire d'une revue qui se doit d'être conservée en bibliothèque, une belle étude consacrée à l'oeuvre de Lionel Ray par Paul Farellier (j'y reviendrai dans le prochain numéro pour évoquer son dernier livre paru, Souvenirs de la maison du temps, Gallimard, 2017), mais en voici déjà un bref extrait : Peut-être aurait-il fallu s'ouvrir à la violence - Des chemins, retrouver un père - Haut comme le jour ... - Qu'avons-nous fait de tout ce temps - Qui nous semblait inépuisable - De tant de flammes de portes vives et d'attente ?

Il y a tout, ou presque, à lire dans Les Hommes sans Epaules, il y en aura donc pouir toutes les faims, toutes les soifs. Peut-être vous citer encore le texte de Frédéric Tison et sa méditation sur Hölderlin, les poèmes de Taslima Nasreen, poète Bengali, les poèmes de Joachim Arthuys et bien évidemment ceux de Jean Pérol... Il faut manger le tout !"

Yves NAMUR (in Le Journal des poètes n°3, septembre 2017, Châtelineau, Belgique).

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" C'est l'un des revues les plus copieuses, appréhendant par ses nombreux dossiers et ses études la diversité de la poésie actuelle. Introduit par un décapant texte d'Yves Bonnefoy sur la poésie qui "tente de rendre aux mots la pleine mémoire de ce qu'ils nomment", des dossiers sur Lionel Ray, poète parmi ceux qui comptent aujourd'hui et sur la poète bengali Taslima Nasreen."

Marie-Josée CHRISTIEN (in Spered Gouez n°23, novembre 2017).




Lectures :

Les Hommes sans Épaules consacrent ce numéro 58 à Daniel Varoujan & le poème de l’Arménie. Au cœur de ce numéro nous trouvons le génocide des Arméniens au siècle dernier, qui n’est toujours pas reconnu par nombre d’Etats, mais aussi d’autres drames, d’autres grandeurs.

Partant de son village natal et d’une expérience personnelle, Christophe Dauphin retrace le parcours de ce peuple Arménien, combattant de la liberté et victime tant de l’indifférence que des dérives autoritaires.

Nous découvrons des poètes exceptionnels, des êtres engagés, des écrits inattendus et révélateurs qui nous parlent non seulement de l’Arménie, de ses épreuves, de ses richesses, mais de la nature humaine dans ses horreurs, ses tristes banalités comme dans ses expressions les plus sublimes. C’est toute la culture et la spiritualité arménienne en ses multiples prolongements qui s’inscrit dans les mots de ces poètes, tous survivants, tous exilés, sauf peut-être d’eux-mêmes. Ce n’est pas seulement une poésie de l’exil ou de la tragédie, ou des tragédies avant la tragédie, nous y découvrons un sens aigu du politique, une sagesse, une métaphysique, un plan pour le futur.

 

Extrait de Terre Rouge :

 

J’ai là, sur ma table, dans une coupe,

un peu de terre d’Arménie.

L’ami qui m’en a fait cadeau croyait

m’offrir son cœur – bien loin de se douter

qu’il me donnait en même temps celui

de ses aïeux.

Je n’en puis détacher mes yeux –

– comme s’ils y prenaient racine…

 

Terre rouge. Je m’interroge :

d’où tient-elle cette rougeur ?

Mais s’abreuvant tout ensemble de vie

et de soleil, épongeant toutes les blessures,

pouvait-elle ne pas rougir ?

Couleur de sang me dis-je,

terre rouge, bien sûr, car elle est arménienne !

peut-être y frémissent encore des vestiges

de brasiers millénaires,

les fulgurances des sabots

qui naguère couvrirent d’ardente poussière

les armées d’Arménie…

Y subsiste peut-être un peu de la semence

qui me donna la vie, un reflet de l’aurore

à laquelle je dois ce regard sombre,

ce cœur qui hante un feu surgi

des sources même de l’Euphrate

ce cœur couvrant l’amour non moins que la révolte…

 

Ce numéro 58 est particulièrement important, il nous entraîne au cœur de l’âme arménienne mais il retrace aussi l’histoire d’un peuple qui nous définit tous.

 

Rémi BOYER (in lettreducrocodile.over-blog.net, 29 octobre 2024).

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